LUTTES, REVOLTES ET RESISTANCES DU PEUPLE MAROCAIN

Publié le par Maroc Resistances

LUTTES, REVOLTES ET RESISTANCES

DU PEUPLE MAROCAIN

LE COLONIALISME FRANÇAIS ET ESPAGNOL AU MAROC

Le Maroc est le seul pays du Maghreb (et du monde arabo-musulman) a avoir été occupé par deux puissances étrangères lors de la période coloniale : la France et l’Espagne.

Même si l’occupation ne fut pas aussi longue (44 ans) que pour la Tunisie (75 ans) et l’Algérie (132 ans), l’histoire parait toute aussi chargée. Par exemple, dans tout le Maghreb colonial, ce ne fut qu’au Maroc qu’eut lieu une véritable guerre entre la puissance colonisatrice et le pays colonisé (la Guerre du Rif, 1921-1926).

Il faudra attendre les protestations populaires contre le Dahir berbère en 1930 pour qu’une véritable résistance politique et intellectuelle se structure. Mais ce qu’il est aussi important de souligner est que les figures du nationalisme marocain de l’époque seront des personnages clés dans le Maroc fraichement indépendant.

Le Traité de Fès : une mise au pas du pays ?

Le traité de Protectorat Français, signé à Fez le 30 mars 1912, s’appuyait en fait sur l’article 8 de la déclaration franco-britannique du 8 avril 1904 (Entente Cordiale), laquelle stipule entre autres une concertation entre la France et l’Espagne (qui n’a pas encore officialisé son protectorat sur les zones d’influence qui lui sont déjà dévolues). Les régions comprises dans ces zones d’influence devaient rester officiellement selon le traité du Protectorat (ce n’est bien entendu qu’un leurre) sous l’autorité civile et religieuse du Sultan, et seraient « administrées, sous le contrôle d’un Khalifa pourvu d’une délégation générale et permanente du Sultan, en vertu de laquelle il exercera tous les pouvoirs appartenant à celui-ci ».

Le sultan alaouite Moulay Hafid (1876-1937), qui a signé le traité du protectorat français.

Ici avec des dignitaires français.

Le traité signé, il fallait coloniser de manière solide le pays. Cette tâche sera attribuée au premier Résident général français du Maroc, Hubert Lyautey. Le futur ministre de la Guerre et Maréchal de France cherchera à réaliser des alliances avec les caïds et chefs des tribus et des confédérations. S’il réussit à Marrakech où le pacha Glaoui mène la soumission de la région au nom du pouvoir colonial, beaucoup d’autres régions n’acceptent pas de se soumettre. Régions qui sont alors conquises par la force tout au long de l’année 1914 notamment (Moyen Atlas, Anti-Atlas). Finalement, chacune des deux puissances coloniales mène ses guerres de conquête militaire sur le territoire prévu par le traité franco-espagnol de novembre 1912, en vertu duquel elles se sont partagées les zones territoriales d’influence dans le nord et le sud de l’Empire chérifien.

Si le traité de Protectorat Espagnol au Maroc est signé le 27 novembre 1912, il faut attendre en réalité février 1913 pour que les Espagnols occupent le pays et installent à Tétouan leur premier Haut Commissaire, le Général Alfau ; ils vont alors aussi désigner, comme Khalifa, par le Sultan Moulay Youssef, son propre frère, Moulay El Mehdi. Leur installation militaire va cependant rencontrer des résistances - le puissant Caïd El Raissouli, qui tient le triangle Larache-El Ksar-Xaouen, tantôt s’alliant tantôt s’opposant.

Dans les années qui suivent, la Première Guerre Mondiale verra l’Espagne rester dans l’expectative, les Espagnols prédisant une victoire allemande et donc un rôle rapidement amoindri de la France au Maroc. L’armistice de 1918 est donc une nouvelle assommante pour eux. L’Espagne n’a pas non plus pu profiter du conflit pour étendre son influence au Maroc aux dépens de la France trop occupée sur les champs de batailles européens, car cette dernière est restée terriblement vigilante durant tout le conflit pour asseoir sa domination.

La Guerre du Rif : la résistance héroïque d’Abd-El-Krim

En juillet 1921, les Espagnols sont vaincus à Anoual, sur la route d’Ajdir par les troupes rifaines d’Abd el-Krim. L’armée Espagnole du Général Sylvestre perd ainsi quelques 20 000 hommes sur le champ de bataille. Commence alors une période trouble pour l’Espagne - les Espagnols allant même jusqu’à reconnaître dans cette bataille un véritable « désastre ». Quant à Abd el-Krim, il est auréolé de gloire et son prestige national est à son firmament. De cette victoire d’Anoual, il retirera en plus un impressionnant trésor de guerre provenant du rachat, à prix d’or, de quelques 1500 prisonniers, et bien entendu de tout le matériel de guerre pris à l’ennemi.

Photo de 1923 sur laquelle posent Abd el-Krim et Horacio Echevarrieta, riche homme d’affaires espagnol qui négocia le rachat des prisonniers espagnols.

Cette défaite est une déflagration en Espagne. L’humiliation est profonde. En avril 1922, le comte de Romanoes appelle à Séville à une entente entre le France et le Maroc pour mieux soumettre le pays et les luttes de résistance d’Abd-el-Krim. Mais l’appel reste vain.

Deux ans plus tard, Abd el-Krim poursuit son avancée et réussit à contraindre les Espagnols, au printemps de 1924, à reculer leur ligne de défense jusqu’aux avancées de Tétouan. Un an plus tard, il essaie même de se frayer un chemin vers Fès pour y détrôner le Sultan. Lyautey, paniqué, demande alors des renforts militaires dans les plus brefs délais. L’aggravation pour les colons, aussi rapide qu’inquiétante de la situation rend nécessaire la tenue urgente d’une conférence franco-espagnole à Madrid en juin-juillet 1925. Puis, une conférence – cette fois militaire - entre le général Primo de Rivera et le Maréchal Pétain (Le Maréchal Lyautey avait donné sa démission quelques mois plus tôt à l’annonce de l’appel aux services de Pétain) a lieu à Madrid, en février 1926, pour convenir des objectifs et des moyens d’exécution d’une offensive.

Se doutant de ces préparatifs, Abd el-Krim dépêche des émissaires pour faire dire sa volonté de négocier dans la paix. Des négociations ont ainsi lieu : c’est la conférence d’Oujda ; mais, ouverte le 22 avril, cette dernière se termine le 7 mai sur un blocage complet. Abdelkrim va alors se voir affaibli puisqu’il devra faire face à la défection de l’importante tribu des Béni Ouriagel. Conscient de sa faiblesse et soucieux de préserver des vies humaines, il capitule le 26 mai et se soumet au Colonel Corap. La glorieuse résistance du Rif prend ainsi fin sur le terrain – mais son apport va très vite être repris pour guider les luttes à venir.

A Paris, au même moment, le Général Primo de Rivera et le Sultan Moulay Youssef inaugurent la Mosquée de Paris et assistent aux côtés du Président Doumergue à la revue du 14 juillet sur les Champs Elysées : le camp de la réaction est plus uni que jamais.

Le Sultan Moulay Youssef à l’ouverture de la mosquée de Paris, le 2 aout 1926.

Le Dahir berbère et la poursuite de la résistance du « nationalisme » marocain

Le Dahir berbère devient ensuite le symbole de l’occupation française au Maroc. Décret signé le 16 mai 1930, il visait à retirer les populations berbères vivant en milieu rural de l’influence de la législation islamique, pour les soumettre directement à la législation de la République française. La lutte que cette décision engendra mit sur le devant de la scène des militants nationalistes appelés à jouer un rôle majeur dans l’Histoire marocaine des décennies suivantes.

Avant même la publication du Dahir berbère, les esprits s’échauffent à l’annonce de son existence, mais il faut attendre le 24 mai et la publication dudit dahir dans le Bulletin officiel, en arabe et en français, pour que les conséquences commencent à se faire sentir et que la résistance s’organise. Début juin, beaucoup de mosquées (notamment à Fès) essaiment un sentiment de violente répulsion vis-à-vis de ce dahir. Un mois plus tard, la venue de Chakib Arsalan (nationaliste arabe d’Egypte) à Tanger et Tétouan et sa rencontre avec des lettrés des deux villes contribuent à l’amplification du mouvement de protestation nationale. Mouvement qui ne s’arrêtera qu’en 1934, année durant laquelle un nouveau dahir réformera celui de 1930. Cet épisode est un nouveau jalon qui a mis en lumière une fois de plus la collaboration étroite entre le Sultan et le colonialisme français et qui reste un des symboles forts de la détermination du peuple marocain à s’opposer aux décisions de l’occupant et à lui résister.

Le jeune sultan Sidi Mohamed, futur Mohamed V, que les Français imposent en 1927

et qui signe le Dahir berbère le 16 mai 1930.

Les années trente et la Seconde Guerre mondiale

Dans les années 30, le mouvement nationaliste marocain s’intensifie. L’influence de l’émir Chakib Arsalan, depuis Genève, sur les leaders marocains de ce mouvement est un secret de polichinelle. Ainsi, c’est sa vision de l’idéal de la nation arabe qui influence le plus Balafrej et ses compagnons.

La première ligue nationaliste à s’affirmer est le C.A.M. (Comité d’Action Marocaine) en 1933, porteur d’un « Plan de Réformes Marocaines » auprès du gouvernement français et du sultan en 1934, influencé non seulement par Chakib Arsalan mais surtout par des compagnons de route français initiateurs de la revue Maghreb (Jean Robert Longuet, Daniel Guérin). Ce club qui tourne à la ligue en s’étoffant numériquement se scinde en 1937 en deux partis : le Parti national pour le triomphe des réformes sous l’égide d’Allal El Fassi et le Mouvement populaire sous celle de Mohamed El Ouezzani. Ce sont ces deux formations qui dominent l’activisme politique marocain de l’époque. Celle d’Allal El Fassi étant, selon la personnalité de ce dernier (ayant fait ses études à l’université traditionnelle Qarawiyyîn de Fès), plus dirigée vers le nationalisme arabe de tendance égyptienne. Tandis que la formation de Mohamed El Ouezzani, selon la personnalité de ce dernier (ayant fait ses études à Paris), étant plus penchée vers le modèle occidental à la française.

A la même période, en juillet 1936, le Général Franco trouve au Maroc ses bases logistiques et le soutien total du corps d’occupation.

Le général Francisco Franco est investi des pleins pouvoirs le 1er octobre 1936

A Rabat, le Consul Général Onitveros y La Plana et la plupart des agents sous ses ordres se rallient au Franquisme. En février 1939, les accords Bérard-Jordana, portant reconnaissance du régime franquiste et affirmant, en particulier, une volonté réciproque de "pratiquer au Maroc une politique de franche et loyale collaboration", entraînent, automatiquement, l’abrogation des dahirs d’exception et le rétablissement de relations normales entre les deux zones (française et espagnole).

Mais, six mois plus tard à peine, commence la seconde guerre mondiale. Les conséquences politiques et idéologiques de la seconde guerre mondiale se font très vivement sentir sur l’échiquier marocain. Les règles du jeu restent les mêmes. Mais leurs conditions d’application se trouvent profondément modifiées du fait des ruptures d’équilibre survenues entre les forces respectives des parties intéressées.

Parallèlement, les nationalistes marocains réclament l’indépendance du Maroc dès le 11 janvier 1944, dans le Manifeste du Parti de l’Istiqlal. Pour autant, l’attitude de soumission et d’abnégation du sultan et du Maroc à l’égard de la France reste la même jusqu’à la fin du conflit.

Vers l’indépendance formelle

A partir de 1952, la plupart des dirigeants officiels de l’Istiqlal sont emprisonnés ou exilés. Abdelkhalek Torres (leader nationaliste et fameux opposant au colonialisme espagnol) est ainsi expulsé de Tétouan vers Tanger par les Espagnols.

En outre, l’exil de Mohamed V va avoir de l’influence sur les rapports entre le Sultan et le parti. Jusqu’alors, le mouvement nationaliste n’était pas soumis au Sultan. Mais après le 20 août 1953, date de déposition du Sultan, ce dernier devient le symbole du nationalisme et son retour constitue un préalable politique pour le Mouvement de libération nationale.

Cette déposition du Sultan va d’ailleurs aussi être le signe de la mésentente entre les deux zones espagnole et française au Maroc. A la conférence d’Aix-les-Bains, les dirigeants nationalistes sont encore les principaux interlocuteurs du gouvernement français. Mais ils ne sont pas en mesure de confisquer l’indépendance à leur profit. Très vite, cependant, devant la montée des oppositions, les négociateurs français en viendront à penser que le retour de Mohamed Ben Youssef est le seul moyen de contrôler la situation. Mohamed Ben Arafa, nommé sultan à la place de Mohamed V, étant extrêmement impopulaire.

En septembre 1955, le général Georges Catroux part rencontrer le sultan déposé Mohamed Ben Youssef à Madagascar. Du 2 au 6 novembre 1955, après son retour en France et l’abdication de Mohammed Ben Arafa le 1er, Mohammed Ben Youssef signe avec le président du conseil des ministres français, Antoine Pinay, les accords de La Celle Saint-Cloud qui mettent en place le processus de transition vers l’indépendance. Et le 16 novembre 1955, il fait son retour au Maroc avec son jeune fils, le prince Moulay Hassan – futur despote du Maroc.

Le 2 mars 1956 prit ainsi fin l’occupation française tandis que l’Espagne mit fin à la sienne le 7 avril.

DES RESISTANTS MAROCAINS FACE AU COLONIALISME


Allal Ben Abdellah se fait connaître le jour de sa mort. Le 11 septembre 1953, cet artisan, tantôt peintre tantôt cordonnier n'a aucune action de résistance à son tableau de chasse. Militant de base du parti de l'Istiqlal à Rabat, il décide de faire le kamikaze contre le sultan malvenu, Mohamed Ben Arafa.

Ce dernier se dirige alors à la prière du vendredi à la mosquée du Méchouar. Ben Abdellah se met sur la route du cortège mais intercepté par le sous-officier Robert King, il est abattu, poignard à la main, par l'officier Mohamed Belhouari.


Allal Ben Abdallah s’attaquant le 11 septembre 1953 au cortège officiel

conduisant le sultan Mohamed Ben Arafa


Houmane Fetouaki a 52 ans lorsqu'il est contacté pour relayer la lutte armée à Marrakech. Il est alors recruté pour deux raisons : sa relation familiale avec le pacha Thami Glaoui et son attachement farouche et insoupçonné à la cause nationale. Entre février et juillet 1954, il constitue un réseau local qui sème la terreur. Coup sur coup, il cible, sans succès, Glaoui lui-même, blesse Ben Arafa, rate de peu le Résident général Guillaume en visite à la ville et abat le commissaire Maurice Monnier. Mais, suite à l'assassinat du contrôleur civil Thivend, son réseau est démantelé. Fetouaki sera condamné à mort par un tribunal militaire et exécuté le 9 avril 1955 au pénitencier d'El Ader.



Al Hansali fait parler de lui le 13 mai 1951, lorsqu'il intercepte un véhicule de colons, leur tire dessus et met la main sur les armes en leur possession. Ses attaques se multiplient, contre des caïds, contre des contrôleurs civils mais aussi contre de simples propriétaires terriens. La presse de l'époque le baptise “le tueur de Tadla”. Dans la région, il fait l'objet d'une traque à l'aveuglette à laquelle prennent part mille soldats. Il est déclaré recherché, moyennant un million de francs. Finalement, le piège se referme sur lui, en compagnie de son frère d'armes, Mohamed Smiha, le 23 juillet 1951. Interrogés et torturés, tous deux seront exécutés le 16 février 1952.



Brahim Roudani - Dès 1952, il est un parrain de la résistance casablancaise. Membre fondateur d'Al Mounaddama assyria (l'Organisation secrète), cet homme riche n'apprécie pas trop “la direction bourgeoise de l'Istiqlal”. Sans pour autant passer à l'acte lui-même, il catalyse les énergies d’opposition et joue, à partir de Casablanca, un rôle majeur dans le renforcement de la résistance rurale, via un réseau d'épiciers dans sa ville d'origine, Taroudant. Arrêté puis torturé au centre de détention Darkoum en juin 1954, il en sort affaibli. A l'orée de l'Indépendance, il tente de jouer le médiateur pour unir les factions armées. Jugé populiste et peu fiable, il est attaqué et abattu par quatre membres marocains du Croissant noir le 5 juillet 1956.



Mohamed Zerktouni, jeune menuisier, issu de l'ancienne médina de Casablanca, est connu pour son ubiquité. Membre dirigeant de l'Istiqlal à Casablanca, il joue d'abord un rôle dans le démantèlement d'une structure ad hoc de lutte armée. En 1951, il est l'un des fondateurs, aux côtés d'Abderrahmane Senhaji, de l'Organisation secrète (0S). Il veille à la constitution des cellules, s'occupe de trouver les armes et de les acheminer vers Marrakech plus tard. Rompu au travail clandestin, il esquive les coups de filet tendus après les opérations (Marché central, Rapide Casa-Alger...) dont il est le maître d'œuvre. Vu ses dons de leader, l'OS veut le protéger, en l'envoyant à Tétouan préparer la naissance de l'Armée de libération nationale. Il refuse. Et le 18 juin 1954, la police vient l'arrêter chez lui. Il se suicide en avalant une capsule de cyanure.



Moulay Abdeslam Jebli est l'un des rares à avoir joué un rôle-clé dans la lutte armée, de bout en bout. Il est, en 1952, aux côtés de Fqih Basri, le mentor du réseau El Fetouaki à Marrakech. Il s'occupe de piloter, avec l'aide d'un certain Mohamed Bouyahya, originaire de Tata, les réseaux de résistance armée au Sud. Il veille, plus tard, avec d'autres dirigeants de l'Organisation secrète, à “sécuriser le système d'information, de la base au sommet”. Arrêté en octobre 1954, il fera preuve, à plusieurs reprises, d'une rare capacité à organiser des fuites de prison. Sous l'Indépendance, il continue “la résistance pour la démocratie”.

Ahmed Rachidi fut assassiné le 4 janvier 1954 face à un peloton d'exécution. Il fut le dirigeant de l'organisation « La Main Noire » et tua le moqaddem Mohamed Ben Larbi pour, dit-il devant le tribunal, “donner un exemple aux autres traîtres”.


Abdellah Chefchaouni - À Fès, la résistance se limitait en grande partie à l'action politique. Sous l'impulsion de Zerktouni, plusieurs tentatives sont menées pour passer à l'action armée. Principale action armée à l'actif de son groupe : l'attentat contre le pacha Baghdadi à Bab Ftouh, le 1er mai 1954. Arrêté le 23 mars 1955, il est exécuté le 2 août 1955.
Rahal Meskini a adhéré au parti de l'Istiqlal à Kénitra en 1947, à l'âge de 21 ans. Il quitte la ville en 1952, au moment où la vie politique est mise à mort, et s'exile à Casablanca. Là, il prend le train en marche au sein de l'Organisation secrète et s'occupe de la région de M'dakra, autour de la ville. Revolver à la main, il est réputé sans merci, autant avec les colons qu'avec les marocains féodaux. En 1954, il est arrêté mais parvient, au bout de quarante jours de torture, à prendre la fuite. Il périt le 17 décembre 1956 sous les balles de militants du Croissant noir. Une autre victime des règlements de compte post-indépendance.

Haj Omar Lamzodi est le fondateur de Jaïch al Atlas (l’Armée de l'Atlas). En revenant de la Mecque durant l'été 1953, il fait escale au Caire et va voir Abdelkrim qui l'incite à “apprendre aux Marocains comment tuer les colonisateurs, ne serait-ce qu'avec des faucilles ou des jets de pierre”. A son retour, Lamzodi constitue un réseau, auquel adhéreront des hommes de Fetouaki, des hommes venus du Sud, comme Hmidou Al Watani (Safi) et un certain Moulay M'barek, dit Si Bouchta, auteur de trois actions-phares : la bombe au café Mers Sultan, la grenade au Bar de la Gironde et l'attentat contre François Avival, “terroriste européen”. Les armes que détenait Lamzodi et ses hommes seront transférées à l'Armée de Libération nationale à Marrakech.

DES LUTTES ARMEES FACE AU COLONIALISME

Exécutions, poses de bombes, émeutes, acheminement d'armes... Les résistants ont ciblé autant les colons que tous ceux qui collaboraient.

Bombe au marché central

Jeudi 24 décembre 1953, en plein Noël, une bombe explose au Marché central à dix heures du matin. L'opération fait dix-neuf morts, dont une française, et quarante-huit blessés. Un certain Mohamed Ben Moussa Al Ibrami se porte volontaire dans une réunion secrète, dirigée la veille par Zerktouni, pour poser la bombe. Les bidons artisanaux, remplis de bouts de fer, confectionnés dans un garage du quartier Bouchentouf, ne sont prêts que tard dans la nuit. Le tout est mis au point dans la précipitation. Résultat, deux autres bombes, posées parallèlement aux Colis postaux et à la Poste centrale, ont la mèche trop courte pour exploser. Mais l'exception Marché central suffit pour que le résident général Juin promette “une lutte sans merci contre les terroristes”.

L'affaire de l'imprimerie Al Atlas

En janvier 1954, Slimane Laraïchi, l'un des dirigeants de la lutte armée, ramène de Tétouan un cliché de Mohammed V (introuvable à l'époque) pour l'utiliser dans un tract. Pour ce faire, il s'introduit la nuit du 6 février, aux côtés d'un groupe de résistants, dans l'imprimerie de Mohamed Ghallab, Al Atlas. Après avoir acheminé une première fournée de tracts, Zerktouni revient et trouve les lieux encerclés par la police. Il s'enfuit. Hassan Sghir, l'un des acteurs de l'opération, avale une capsule de poison. Il devient le premier résistant suicidé de l'histoire du Maroc colonisé. Quant à Laraïchi, il réussit à filer grâce à son compagnon, Dahous, qui abat au pistolet le commissaire Boyer. Les fugitifs iront alors de douar en douar trouver refuge.

Bombes sur la ligne Casa-Alger

Trois jours après la déposition de Mohammed V, le train reliant Casa-Alger est déraillé, à 5 Km de la gare de Port Lyautey (Kénitra). Bilan : un technicien mort et onze blessés. L'opération, menée par un groupe de résistants dirigé par Bouchaïb Ben Omar, est plus spectaculaire qu'efficace. Mais celle effectuée sur la même ligne, le 7 novembre 1953, par l'Organisation secrète, via Mohamed Mansour, fait plus de dégâts. Ce dernier pose, à l'approche de Rabat, l'engin explosif dans les toilettes de la deuxième classe. Il descend aussitôt et monte dans la voiture du dirigeant Saïd Bounaïlat qui l'attend. La déflagration retentit tout juste après le pont du Bou Regreg. Bilan : six morts, dont deux Français et quatorze soldats blessés. Elle fera date et les attaques contre les lignes ferroviaires se multiplient par la suite.

Attentats contre Glaoui et Ben Arafa

En mars 1955, les mosquées de Marrakech sont le terrain des opérations du réseau El Fetouaki. La première opération, le vendredi 5 mars, a lieu à la mosquée Koutoubia, où deux bombes sont lancées. Le pacha Glaoui, principale cible, en sort indemne, mais une trentaine de musulmans sont blessés. Le 19 mars, le groupe de résistants marrakchis récidivent à la mosquée Berrima, jouxtant le palais. Sachant que le sultan mal aimé Ben Arafa y faisait sa prière, le jeune Ahmed Ben Ali y pose une bombe. Le sultan, ainsi que six membres de sa garde rapprochée, sont blessés. Glaoui s'occupe lui-même de liquider sur place l'exécutant, connu sous le nom de “Oukkala”.

Exécution du Dr. Emile Eyraud

Avant sa mort, Mohamed Zerktouni a planifié le meurtre de l'un des suppôts du régime colonial, le docteur Emile Eyraud, directeur alors du quotidien « La Vigie marocaine ». L'opération sera exécutée deux semaines après sa mise à mort. Le chef de l'opération, Driss Lahrizi, abat sa cible par une balle dans le dos, à sa sortie du journal, le 30 juin 1954. Devant rejoindre ses frères d'armes, à côté du café La Chope, Lahrizi est intercepté par des colons. Il tire alors sur eux. Une fusillade s'ensuit. Il s'en sort avec un bras cassé et sera plus tard condamné à mort. Quant à son acolyte Brahim Firdaous, il en sort indemne. Un faux passeport en sus, il sera exilé au Caire en attendant des jours meilleurs.

Attentat contre Pascal Boniface

En 1955, l'Organisation secrète que dirige alors Fquih Basri, à Casablanca, charge Mohamed Sarjane et Ahmed Touil d'assassiner Pascal Boniface, le chef de la région de Casablanca. Sa longévité (de 1944 à 1955) et sa défense acharnée des intérêts coloniaux ont rendu cet homme intouchable. Les deux résistants le suivent à la trace. Le 10 mars, ils le traquent à partir de l'avenue Foch, lieu de sa résidence. L'un des deux tire sur Boniface, lequel simule la mort. à l'aide de ses gardes, sa voiture redémarre et l'attentat tombe à l'eau.

Armes acheminées à bord de Dina

En décembre 1954, Abdelkrim Khatib, Houcine Berrada et Mohamed Bensaïd Aït Idder se mettent d'accord, au nom de l'Armée de Libération nationale, avec leurs pairs algériens, Ben Bella et Boudiaf, pour partager la cargaison d'armes provenant d'Egypte, à bord du Dina. Le résistant Brahim En Naïl s'occupe de gérer le transbordement des armes devant parvenir au port de Kebdana. à l'arrivée de la cargaison en février 1955, les Marocains récupèrent 96 fusils, 144 grenades et des munitions ; les algériens ont droit au double. La résistance se prépare à une guerre qui n'aura pas lieu.

Soulèvement d'Oued Zem

Deux ans après la déportation de Mohammed V, le 20 août 1955, la résistance urbaine s'abstient de manifester. A la surprise générale, les manifestations les plus sanglantes ont lieu dans la bourgade d'Oued Zem, où les quelque 800 habitants français se sentent chez eux. Réprimés par les caïds locaux et les contrôleurs civils, des résistants et autres agriculteurs portant les photos de Mohammed V ont attaqué des lieux de commerce et des postes de police. Bilan, quarante-neuf Européens sont morts. La répression, menée sous l'ordre du résident général Grandval, fait officiellement 700 morts, chiffre que Charles André Julien (historien et spécialiste de l’Afrique du Nord) qualifie de « ridicule ».

ZOOM SUR LA RESISTANCE ARMEE DANS L'ATLAS MAROCAIN

Il y a cent ans, la bataille d'Elhri (13 Novembre 1914) donna un coup d'arrêt momentané à l'avancée coloniale. Elle fut, de l’aveu même des Français, le plus grand désastre connu par leur armée dans toute sa campagne en Afrique du Nord.

1. Mise en contexte

Si on date l'établissement du colonialisme français au traité de Fès en 1912, le Maroc n'est déjà plus indépendant à cette date-là. Depuis quelques décennies en effet, l'empire chérifien est à genoux et le Maroc est une proie facile pour les appétits coloniaux.

Le général Lyautey prend prétexte de l'assassinat du docteur Mauchamp, en 1907, pour occuper Oujda. En août de la même année, le port de Casablanca subit une terrible campagne de bombardements et la Chaouia est prise. Avec un pied à la frontière orientale, un autre sur la façade atlantique, la France a désormais mis en place le système colonial. Le corps expéditionnaire s'apprête à prendre le royaume en tenaille. Mais la résistance est farouche. La mise du royaume sous le joug du colonialisme français s'étire ainsi sur un quart de siècle et les historiens avancent un bilan d’au moins 100 000 morts marocains pour la période 1907-1930.

En 1914, la première guerre mondiale en Europe réduit les moyens mis à la disposition du commandement militaire français et pourtant, pour les colons français, il faut encore achever la conquête et mener la bataille du Moyen-Atlas central - ce verrou stratégique situé sur deux axes de circulation majeurs : Fès-Rabat et Fès-Marrakech (par le Tadla).

Or, cette région des Atlas (surtout le Moyen et le Haut Atlas) va montrer une résistance armée acharnée contre ce colonialisme français. Et cette résistance va même durer plus de 25 ans (de 1908 à1936). C’est dans ce cadre que va se jouer la bataille célèbre d’El Herri en 1914.

La casbah de Khénifra, à 15 km d'EI Herri, en 1914.

2. Mise en déroute des troupes coloniales

Après Taza, conquis en mai, Lyautey concentre ses offensives sur Khénifra, la capitale régionale que Moha Ou Hamou a abandonnée pour se replier dans la montagne et assiéger l'ennemi. Les Marocains multiplient les attaques, galvanisés par l'annonce de la Grande Guerre, convaincus qu'ils peuvent faire refluer les Français. Lyautey en témoigne en août : "Les dissidents, persuadés que nous allons évacuer le Maroc, ne vont pas cesser d'attaquer nos postes avancés et nos convois de ravitaillement."

En novembre, Moha Ou Hamou établit son camp à El Herri, à 15 kilomètres de Khénifra. Le 13 novembre, à l'aube, la colonne Laverdure se lance à l'aveuglette pour s'emparer de Moha Ou Hamou,

La bataille se déroule en deux phases : dans un premier temps, Moha Ou Hamou et les siens sont surpris, désorganisés, et tous leurs biens sont pillés. L’attaque a eu lieu au moment où tout le campement dormait, et la surprise a été totale. Laverdure autorise alors la razzia : viols, pillage et aucune règle de la guerre n’est respectée. Les assaillants français tirent aussi dans le tas, si bien qu’enfants, femmes et vieillards sont tués dans leur sommeil.

Malgré l’effet de surprise, Moha Ou Hamou réussit, lui, à s’échapper et à donner l’alerte, si bien que quelques heures plus tard, de toutes les tribus limitrophes, les combattants ont afflué vers Elhri. Ce fut alors la seconde phase de la bataille. Ils tombèrent sur les Français qui déjà avaient amorcé leur retraite dans le lit de la rivière dite Bouzeqqor, à mi chemin entre Elhri et la ville de Khénifra. Le massacre a alors commencé et ce d’autant plus bel que les morts marocains jonchaient encore le sol et que les destructions causées par la barbarie française étaient encore toutes fraîches.

Les témoignages recueillis auprès de dizaines de participants à cette bataille s’accordent tous sur l’essentiel des événements : la bataille fut très dure et les armes inégales. Un des combattants raconte : « Ce qui nous a causé le plus de dégâts, c’étaient les mitrailleuses lourdes installées sur le sommet des petites collines environnantes d’Elhri. Je me rappelle qu’il y en avait une installée au milieu d’une touffe de jujubier et qui fauchait tout ce qui bougeait dans les alentours. Nous étions quelques dizaines de cavaliers à examiner la situation. Nous nous sommes mis alors en ligne comme pour la fantasia, nous avons éperonné nos chevaux très fort pour les enrager et nous nous sommes dirigés d’un seul bloc vers les feux de cette mitrailleuse. Beaucoup parmi nous tombèrent, mais nous avons réussi finalement à atteindre cette touffe. A partir de ce moment là, la bataille a commencé à tourner en notre faveur, surtout avec l’arrivée incessante des renforts ».

Ainsi, dans cette bataille, ce qui va faire la force des Zaïan, c'est moins leur nombre que leur potentiel militaire fondé sur leur valeur guerrière, leur cohésion, leur discipline, et sur l'importance de leur cavalerie, qui comptait plus de 2 500 hommes, aguerrie, remarquable par sa mobilité, son esprit offensif. Par ailleurs, les résistants ont su compenser le handicap d’armes inégales par leur connaissance du terrain et leur grande mobilité, qui leur ont permis de manœuvrer à leur aise. Ainsi, leurs armes favorites ont été : l'embuscade, l'attaque par surprise. En un mot : la guérilla.

Cette victoire héroïque ne change certes pas le cours de la guerre (Khénifra n'est pas repris) mais elle fut bien une défaite cinglante pour la France, avec 600 morts dénombrés parmi les troupes coloniales. Et surtout cette résistance du peuple face à l’occupant reste un symbole fort de lutte armée dans cette guerre de libération nationale.

Moha Ou Hamou, après une folle cavale qui durera de longues années, restera fidèle à son combat et à sa détermination d’insoumis et mourra les armes à la main le 27 mars 1921.

Moha Ou Hamou, chef de la tribu berbère des Zaïan.

Compte-rendu des militaires français

" Le 12 novembre, cinq mois se sont écoulés depuis notre installation à Khénifra. Moha Ou Hammou est mis en confiance par notre inaction et par les premiers pourparlers engagés ; il installe son campement à une quinzaine de kilomètres de Khénifra, aux abords du petit village d'El Herri, dans une cuvette traversée par l'oued Chbouka, affluent du Serrou ; il paraît se relâcher de son intransigeance et envoie ses malades se faire soigner au poste. (...)

Le commandant Laverdure commande la poste de Khénifra. Il décide d'enlever le campement de Moha Ou Hammou, malgré les ordres qui lui interdisent formellement toute sortie, (...). Cette décision semble avoir été inspirée au colonel Laverdure par un mokhazni zaïan, récemment passé à notre service et désireux de venger, sur Moha ou Hammou, un affront personnel que celui-ci lui avait infligé (...)

A 2h30, la colonne se met en marche. Elle compte 43 officiers et 1230 hommes.

A midi, un convoi de blessés, harcelé par les insoumis, et quelques centaines d'hommes à bout de souffle devaient rentrer, seuls, à Khénifra apportant la nouvelle du désastre subi. (...)

Le bilan : sur un effectif de 43 officiers, 1232 hommes, la colonne avait perdu 33 officiers tués, 590 hommes troupe tués, 176 blessés dont 5 officiers. Sur les 43 officiers ayant participé au combat, 5 officiers seulement étaient revenus indemnes dont 4 cavaliers. (...)

Jamais un échec aussi désastreux n'avait été infligé à nos troupes, en Afrique du Nord.

C'était, pour les Zaïans, un immense succès (...) "

Général A.Guillaume, Les berbères marocains et la pacification de l'Atlas central, (1912-1933), Paris, 1946

LA GUERRE DU RIF : UNE GUERRE POPULAIRE

CONTRE LE COLONIALISME

Nous sommes en 1920. Bien avant la guerre d’Indochine et la guerre d’Algérie, celle du Rif est bien la première guerre anticoloniale du XXe siècle.

Le Rif, étroite bande côtière située du nord du Maroc méditerranéen, est, depuis 1912, sous domination espagnole, le reste du pays sous domination française.

Un homme, notamment, va alors dénoncer cette oppression coloniale et va se jeter dans la lutte pour l’indépendance du Maroc en prenant les armes contre l’occupant espagnol : c’est homme est Abdelkrim El Khattabi. Ce dernier parcourt alors le Rif et sensibilise les populations : " Nous devons, disait-il, sauver notre prestige et éviter l’esclavage à notre pays. " Son projet : faire du Rif une république moderne, en développer l’économie et l’éducation, et la faire reconnaître par la Société des nations (SDN). Il pense dans un premier temps faire accéder le Rif à l’indépendance en bonne entente avec les Espagnols. Mais ces derniers refusent.

Abdelkrim El Khattabi

La guerre devient alors inévitable : d’une part, les tribus berbères du Rif refusent l’autorité espagnole et demande à l’Espagne de quitter le Maroc ; et de l’autre, les Espagnols envoient une armée de 100 000 hommes commandée par le général Sylvestre.

Or, le 20 juillet 1921, l’armée espagnole subit un véritable désastre, sa défaite militaire la plus cuisante avec la bataille d’Anoual qui fit 15 à 20 000 victimes dans ses rangs dont 3500 soldats tués et plus de 5000 faits prisonniers ; toute l’artillerie lourde espagnole et un véritable arsenal (fusils et munitions) tombent entre les mains des Rifains. Sylvestre se suicide. Pendant deux ans, Abdelkrim va ensuite tenir les montagnes du Rif et va, de victoire en victoire, repousser les Espagnols sur les côtes.

Partisans d’Abd El-Krim au repos dans le désert

En 1922, est proclamée la République du Rif et très vite, elle est vécu comme un prélude à la libération de tout le Maroc. Un peu partout dans le monde des « révolutionnaires » ont les yeux tournés vers Abdelkrim.

Les troupes d’Abd El-Krim en campement devant Tanger en 1925

Madrid est tenté d’abandonner la région aux rebelles, mais le maréchal Lyautey demande son élimination. Paris craint la contagion anti-coloniale. Finalement, le 30 août 1925, ces deux puissances coloniales s’allient sur un même objectif : écraser dans le sang la République du Rif.

La France prend alors des mesures, vole au secours de l’Espagne, dépêche une troupe de 500 000 hommes commandée par le maréchal Pétain. Abdelkrim, qui a lancé son armée de 75 000 hommes contre le Maroc français, est stoppé. Le rapport des forces est inégal. Abdelkrim fait face à 32 divisions franco-espagnoles. Pétain mène une guerre totale : les villages rifains sont ruinés par les bombes de l’aviation et de l’artillerie ; les populations sont menacées d’extermination, l’armée française ne faisant pas de prisonniers !

Massacre du peuple rifain par les Espagnols

En France, malgré les manifestations de solidarité avec les peuples (grève politique avec manifestations, par exemple, le 12 octobre 1925 avec 900 000 grévistes), l’engagement d’intellectuels tels qu’Henri Barbusse et André Breton et la campagne, à contre-courant, menée par le PCF pour arrêter "immédiatement l’effusion de sang au Maroc ", la guerre se poursuit.

Devant le massacre qui se prépare, Abdelkrim offre alors de se constituer prisonnier pour protéger les siens. Cependant, les puissances coloniales ne peuvent tolérer qu’un tel soulèvement reste impuni. Et dès 1926, des avions munis de gaz (utilisation de 407 tonnes de gaz hypérite (gaz moutarde), chloropicrine, phosgène) bombardent des villages entiers faisant des marocains du Rifs les premiers civils gazés massivement dans l’Histoire.

Abdelkrim est vaincu en 1926 et est fait prisonnier ; il est alors déporté sur l’île de la Réunion pour un exil de 21 ans. Il s’évade enfin en 1946 et s’installe au Caire où il est l’un des fondateurs du Comité de libération du Maghreb.

La guerre du Rif a encore aujourd’hui un tel retentissement que le nom d’Abdelkrim est devenu le symbole des mouvements de masse anticoloniaux de libération nationale. Son combat fut précurseurs des grands mouvements d’indépendance qui ont touché les empires coloniaux au lendemain de la Seconde Guerre mondiale et ses méthodes de guérilla ont inspiré Mao Tsé-Toung et Hô Chi Minh. Cette guerre de libération nationale reste pour tous un modèle héroïque de résistance face à l’oppression et la domination.

Vaincre à tout prix ! La résistance du Rif ou les crimes contre l’Humanité des Etats Français et Espagnol

En dépit de l’illégalité (traités signés après la première guerre mondiale interdisant tant la production, le stockage, la commercialisation que l’utilisation des armes chimiques), il a été fait usage d’armes chimiques de destruction massive, de type ypérite (gaz moutarde), phosgène et chloropicrine contre le peuple rifain entre 1924 et 1927, principalement par l’Espagne et accessoirement par la France.

Devant les désastres subis par l’armée espagnole dans le Rif, de nombreuses voix se sont élevées en Espagne, y compris parmi des députés, pour que des armes chimiques soient employées contre les rifains. Or l’Espagne ne disposait pas de ce type d’armes. Comment dès lors se les procurer?

C’est là que la complicité de la France apparaît avec la société Schneider. Tout en condamnant les armes chimiques, la France ne s’est pas privée de les vendre à l’Espagne et même de former des techniciens. Par la suite intervient le Dr. Allemand Stolzenberg et la société du même nom. Mais l’achat de ce type d’armes n’est pas suffisant, et c’est pourquoi il est décidé de les produire sur place. Cela s’est fait à Madrid même, dans la fabrique de la Maranosa, puis dans le Rif, entre Melilla et Nador. Le secret est tel que les concernés ne parlent pas d’armes chimiques ; on parle plutôt de «gaz», de bombes X

Les victimes de ces armes chimiques ont été nombreuses : elles ne sont pas seulement les guérilleros rifains, engagés dans le combat. Ce sont aussi et en grand nombre les populations civiles – sans parler des techniciens et militaires espagnols touchés suite à des accidents de manipulation ou encore de l’environnement.

D’ailleurs les cibles étaient essentiellement des cibles civiles, le lieu et le jour, celui du marché où les populations allaient pour acheter et vendre et se retrouvaient ainsi réunies. Les victimes ne sont pas seulement celles qui moururent dans l’immédiat. Les victimes des armes chimiques de destruction massive on les retrouve encore aujourd’hui parmi les descendants des victimes d’hier. Les statistiques officielles des hôpitaux marocains attestent que 80% des patients atteints de cancers du larynx sont originaires du Rif. Le rapport de cause à effet entre ce type d’armes et les cancers n’est plus à prouver et a été démontré scientifiquement - sans parler des conséquences psychologiques.

mobilisation anticoloniale
a bas la guerre COLONIALISTE CONTRE LA RESISTANCE DU RIF !

La guerre du Rif (1921-1926) est un événement fondamental, non seulement de notre histoire coloniale, mais aussi et surtout de notre histoire sociale. Fondamental tout d’abord, parce qu’il s’agit de la première grande guerre d’indépendance dans l’empire français. Fondamental ensuite, parce que celle-ci va provoquer la véritable naissance du mouvement anticolonialiste en France. Fondamental enfin, parce que c’est à cette occasion que pour la première fois, le monde ouvrier va se mobiliser à travers une grève générale contre un conflit colonial.

La guerre du Rif, une guerre coloniale

Au début du XXe siècle, les tensions entre États européens sont à leur comble. La politique impérialiste des différents empires et les velléités coloniales des uns et des autres accroissent plus que jamais les rivalités. Le Maroc, est l’un des principaux terrains affrontement.

Depuis 1906 et la conférence d’Algésiras, la France contrôle toute la partie centre, la plus fertile. Elle est sortie vainqueur de sa lutte face à l’Empire allemand pour le contrôle de cette région après notamment deux grandes crises en 1905 et 1911. A partir de 1912, la présence française prend la forme d’un protectorat. C’est le général Lyautey qui représente localement la République en tant que commissaire résident-général au Maroc.

L’Espagne contrôle quant à elle les régions du Nord (Rif) et du Sud (Sahara) du pays. L’ancienne puissance coloniale souhaite alors retrouver son rang après la perte de ses territoires d’Amérique au cours du XIXe siècle. Elle mène ainsi une violente politique de confiscation des terres afin d’exploiter au mieux les gisements de fer des montagnes du Rif. Cependant, elle doit s’opposer à de nombreuses reprises à des révoltes des tributs berbères.

A partir de 1919, l’armée espagnole lance plusieurs offensives afin de prendre le contrôle des régions insoumises sur son territoire. Cependant, après une série de victoire, son avancée est freinée. En effet, la violence de la domination ibérique provoque le mécontentement d’une partie des notables marocains pourtant jusque-là à son service. L’un d’entre eux, Abdelkrim, parvient en quelques mois à unifier les tributs berbères d’ordinaire en conflit les unes avec les autres.

Sous son impulsion, une véritable révolte d’indépendance voit le jour dans la région du Rif à partir de 1921. Les affrontements entre les deux camps sont alors particulièrement sanglants. Malgré ses plus de 200 000 soldats et ses dépenses importantes pour l’effort de guerre, l’Espagne subit de nombreuses débâcles et perd plusieurs dizaines de milliers de soldats. Certaines de ses garnisons sont même massacrées par les rifains.

L’armée espagnole se retrouve alors dans l’incapacité de pacifier « son » territoire. Face à cet état des choses sa réponse est particulièrement violente. En effet, le pouvoir ibérique décide de faire parler son industrie. Une véritable guerre totale débute alors. Artillerie lourde, aviation et armes chimiques font ainsi leur entrée dans le conflit. Des villages et des terres agricoles sont pris pour cible. Les civils sont par ailleurs victimes des pillages, notamment perpétrés par la légion étrangère espagnole dont le jeune officier Francisco Franco a récemment pris le contrôle.

De son coté, Abdelkrim proclame la République du Rif en 1922. Un semblant d’État voit alors le jour. Une assemblée rassemblant les représentants de 41 tributs ainsi qu’un gouvernement sont créés. Le leader rifain réclame le droit pour la jeune République à l’autodétermination. « Nous considérons que nous avons le droit, comme toute autre nation, de posséder notre territoire (…). Nous voulons nous gouverner par nous-mêmes et préserver entiers nos droits indiscutables ».

Cependant, un événement vient bouleverser le cours des choses en 1925. En effet, considérant que l’avancée des troupes rifaines vers son territoire représente une menace, la France entre en guerre à son tour. Ce que la Troisième République redoute alors par-dessus tout, c’est que l’exemple d’Abdelkrim face tache d’huile dans la région et que des révoltes anticoloniales voient le jour dans les territoires voisins.

Ils ont dit « non » à l’impérialisme et aux guerres coloniales

Au pouvoir depuis 1924, c’est le gouvernement du Cartel des gauches, auquel appartiennent essentiellement des radicaux et des républicains, qui fait entrer la France dans la guerre du Rif durant le mois d’avril 1925. Le moins que l’on puisse dire est que rien n’est alors laissé au hasard. Pas moins de 350 000 soldats, dont bon nombre de coloniaux (malgaches, sénégalais, marocains…), sont envoyés sur place.

Durant le mois de juillet 1925, Philippe Pétain prend les commandes des troupes françaises. C’est d’ailleurs à cette occasion qu’il rencontre Franco, alors devenu général, et que des liens se créent entre les deux hommes. Ce n’est pas par hasard, si l’espagnol sera décoré de la légion d’honneur en 1930 par André Maginot.

Supérieurs en nombre et surtout sur le plan technologique (aviation, bombes chimiques…), les européens vont rapidement prendre le dessus sur l’armée rifaine. Cependant, trois mois après l’entrée en guerre, l’armée française compte tout de même déjà près de 1005 morts et de 3711 blessés.

Du coté de l’hexagone, l’engagement de la France dans le conflit est loin de faire l’unanimité. Dans un texte publié le 02 juillet 1925 dans l’Humanité et intitulé « Appel aux travailleurs intellectuels », nombre d’intellectuels et artistes surréalistes comme Henri Barbusse, Louis Aragon, Robert Desnos ou encore Paul Signac expriment leur vive condamnation de la guerre et de la colonisation.

« Emus et révoltés par les atrocités commises de part et d’autres sur le front de l’Ouergha, nous constatons qu’elles sont inhérentes à toute les guerres et que c’est la guerre qu’il faut déshonorer (…). Nous proclamons une fois de plus le droit des peuples, de tous les peuples, à quelque race qu’ils appartiennent, à disposer d’eux-mêmes ».

C’est cependant essentiellement le Parti communiste qui va mener au quotidien la campagne d’opposition à la guerre du Rif. Dès 1924, il affirme d’ailleurs son soutien à la révolte rifaine en saluant « la brillante victoire du peuple marocain sur les impérialistes espagnols ». En effet, comme l’expose la 8e condition d’adhésion à la IIIe Internationale, le PC défend « tout mouvement d’émancipation dans les colonies » et exige « l’expulsion des colonies des impérialistes de la métropole ».

Le 16 octobre 1925, communistes et surréalistes signent un texte commun dans l’Humanité, intitulé « Aux soldats et aux marins », dans lequel ils appellent les militaires français à la fraternisation avec les rifains. « On vous envoie mourir au Maroc pour permettre à des banquiers de mettre la main sur les riches gisements de la République du Rif, pour engraisser une poignée de capitalistes (…). Vous ne serez pas les valets de la banque. (…). Fraternisez avec les rifains. Arrêtez la guerre du Maroc ».

De son coté la SFIO, qui soutien le gouvernement sans y participer, ne se range finalement pas derrière son allié et refuse de voter les crédits militaires en juillet 1925. « Par principe par tradition, nous sommes adversaires du colonialisme, qui est la forme la plus redoutable de l’impérialisme, c’est à dire le vieil instinct qui pousse toute nation à conduire le plus loin possible son impérium, sa domination ». Cependant, les socialistes ne participeront pas pour autant à la campagne d’opposition à la guerre.

Grève générale contre la guerre du Rif

Au-delà de l’implication de ses élus, le Parti communiste entend de son coté mobiliser la classe ouvrière toute entière contre ce conflit colonial. En effet, il ne fait aucun doute pour lui que le sort des rifains et celui du prolétariat français sont liés, car ceux-ci luttent contre un même ennemi.

Afin d’organiser la mobilisation contre la guerre, le PC crée en mai 1925 un comité d’action avec à sa tête Maurice Thorez. Réuni à Paris en juillet à l’occasion d’un congrès ouvrier, celui-ci lance l’idée d’une future grève générale de 24 heures. Au-delà de l’opposition à la guerre au Maroc, il est par ailleurs décidé d’élargir les revendications afin de pouvoir mobiliser un maximum de grévistes le jour J: opposition aux impôts Caillaux, augmentation des salaires…

Cependant, la répression policière envers cette lutte est particulièrement importante. Les militants qui distribuent des tracts appelants les soldats à refuser de partir ou encore à fraterniser avec l’ennemi sont arrêtés. Certains, étrangers, sont même expulsés vers leur pays d’origine. Le préfet de Paris décide quant à lui de faire interdire sur la voie publique « toute chanson faisant allusion aux événements du Maroc ».

Cette pression imposée par les pouvoirs publics, est l’une des raisons qui pousseront le Comité d’action contre la guerre du Rif à ne lancer finalement l’appel à la grève générale que le samedi 10 octobre pour le lundi 12. Une sollicitation tardive qui s’explique par ailleurs par la volonté des communistes et la CGTU d’empêcher toute riposte patronale.

C’est ainsi, dans des conditions loin d’être idéales, qu’une grande journée de mobilisation voit le jour. Ci celle-ci n’est conséquente qu’en région parisienne, des cortèges vont cependant défiler sur tout le territoire. Dans certaines communes, les manifestants défient même le patronat en forçant les portes des usines afin d’aller convaincre les non grévistes de se mobiliser. A Suresnes ou encore à Halluin (59), ceux-ci sont cependant accueillis à coups de fusil. Un ouvrier de l’arsenal de Puteaux trouve même la mort… Ailleurs, c’est devant les casernes que la foule se rend afin d’appeler les soldats à rejoindre le mouvement. Partout, le slogan « A bas la guerre du Maroc ! » est repris par les opposants au conflit colonial du Rif.

Cette première grande journée de mobilisation anticolonialiste est par ailleurs elle aussi marquée par l’importante répression policière dont sont victimes les grévistes. En effet, de nombreuses échauffourées entre manifestants et forces de l’ordre vont se multiplier sur l’ensemble de l’hexagone. Ces dernières ouvriront même le feu à plusieurs reprises.

Des centaines de personnes seront arrêtées pour des faits de grèves ou de propagande (près de 400 sur l’ensemble de l’année 1925). Expéditive, la justice prononcera au total plus de 10 ans d’emprisonnement (13 mois pour Cachin, 8 mois pour Thorez…).

Au lendemain de la mobilisation, l’Humanité avance le chiffre de 900 000 grévistes. Les historiens s’accordent cependant aujourd’hui sur l’exagération de cette estimation. La réalité se situe selon eux plutôt entre 600 000 et 300 000.

Relativement modeste, la mobilisation contre la guerre du Rif ne permettra de faire infléchir la politique impérialiste du gouvernent. Cependant, elle est le point de départ d’un mouvement qui prendra de l’ampleur par la suite. Elle est surtout un moment singulier de l’histoire du monde ouvrier.

En effet, pour la première fois en France, une partie non négligeable du prolétariat a montré, à travers une journée de grève générale, sa solidarité avec un peuple issu des colonies et surtout affirmé son opposition à la colonisation.

NOUVEAU SOULEVEMENT DU RIF

En 1958-1959

Le Rif a toujours été saigné à blanc et a toujours payé un lourd tribut vis à vis de la monarchie. L'une de ces horreurs est la répression sanglante ordonnée par le Roi Mohamed V deux années après la soi-dite indépendance, du soulèvement rifain de 1958 massacré par l'entremise du Général Oufkir et du prince Moulay Hassan, le futur Roi Hassan II.

Mais ce qu’il est important de bien comprendre ici, c’est que cette répression n’est en réalité que la dernière cartouche possible trouvée par le régime pour mettre au pas toutes les tensions autonomistes rifaines qui n’ont eu de cesse de s’affirmer, de plus en plus nettement, et ce depuis le début des années 50.

Ainsi, faut-il rappeler que c’est bien dans ce contexte d’après seconde guerre mondiale, d’évolution des idées nationalistes et des mouvements indépendants, qu’un groupe armé de résistants Rifains - se présentant comme étant « l’Armée de Libération Nationale » et placé sous la direction d'Abbès Messaâdi-, se lança, dès le 02 octobre 1955, dans des opérations armées contre l’occupation coloniale et pour «l'indépendance totale» du Maroc.

Défilé de l'ALN à Nador vers 1956

Très vite, les membres du parti de l’indépendance (Istiqlal) et d’autres tendances du dit « mouvement national » s’opposèrent aux actions de l’armée de libération - préférant poursuivre les négociations entamées depuis août 55 avec les colons autour du traité d’Aix-les-Bains. Mehdi Ben Berka, lui-même, demanda plusieurs fois à Abbès Messaâdi de mettre fin aux opérations armées. Mais ce dernier refusa et continua la résistance armée. Et finalement, le 28 juin 1956, Abbès Messaâdi est assassiné par trois individus à Ain Aïcha dans la province de Taounate. Pour autant, la résistance dans le Rif ne va pas en rester là et la mort d'Abbès Messaâdi va, dès 1958-1959, être l’étincelle de nouvelles révoltes dans le Rif.

Abbes Messaâdi, liquidé en 1956

Le 11 novembre 1958, Mohamed EL-Hadji Sellam Ameziane, du Parti de l’Indépendance et deux autres membres des Beni Ouriaghel, Abdel Sadaq Khattabi et le fils de Abdelkrim al-Khattabi, Rachid, présentent un programme en 18 points pour le Rif au Roi Mohammed V ; ce programme compte des préoccupations des Rifains, allant de l'évacuation des troupes étrangères du Rif, au retour d'Abdelkrim al-Khattabi au Rif, la création d'emplois, la représentation politique et les réductions d'impôts.

Cependant, avant que ce programme n'ait été présenté au roi, la révolte du Rif a déjà commencé et parallèlement, la décision de la monarchie est déjà prise : seule s’impose l’idée d’une campagne de liquidation collective contre ces Rifains qui n’acceptent pas les nouvelles conditions politiques et sociales du nouveau système colonial.

Ainsi, d’une part, la région s'embrase, et ceci à l'occasion du troisième anniversaire de la mort d'Abbès Messaâdi, lorsque le docteur Khatib et Mahjoubi Aherdane, autre leader de l'Armée de libération du Nord, procèdent au transfert de ses cendres – du fait d’une interdiction gouvernementale de ces obsèques. Le ressentiment est alors à son comble

Et de l’autre, le général Oufkir (surnommé plus tard le « boucher du Rif »), appuyé par une unité blindée sous les ordres du capitaine Larbi Chelouati, est alors envoyé sur place pour rétablir l'ordre. Hassan II, avant d’être officiellement désigné en 1957, a hérité du titre de chef d'état-major des FAR et c’est à ce titre qu'il est aussi chargé de mater le soulèvement du Rif et qu’il installe son PC opérationnel à Tétouan, l'ancienne capitale du Maroc espagnol.

La répression qui s'abat sur le Rif est alors terrible et les soulèvements des Rifains sont noyés dans le sang. Des bombardiers légers, pilotés par des Français bien qu'arborant des cocardes marocaines fraîchement peintes sur leurs fuselages, attaquent les villages des Béni-Ouriaghel - la puissante tribu qui avait déjà été le fer de lance de l'insurrection entre 1923 et 1926-, et on estime aujourd’hui le bilan de cette répression sanglante à environ 8 000 assassinats.

Incontestablement, la soumission du Rif par les FAR a été barbare. Les témoignages en ce sens abondent. Cependant, toutes les campagnes précédentes l'ont été également. Lorsque la France et l'Espagne envoient au Rif, respectivement, 325 000 et 100 000 soldats pour obtenir la reddition d'Abd el Krim en mai 1926, ce sont 32 divisions de fantassins et 44 escadrilles de l'armée de l'air qui combattent 75 000 Rifains, dont à peine plus de 20 000 sont armés. Elles quadrillent la montagne, brûlent des centaines de villages, procèdent à des bombardements systématiques. Pendant l'hiver 1956-1957, après le déclenchement dans le Rif de la lutte armée contre la présence française, l'italien Attilio Gaudio était l'un des trois journalistes étrangers couvrant les événements sur place. Dans son recueil de reportages paru en 1991 à Paris, Guerres et paix au Maroc, il écrit : « Nous étions horrifiés ... ou trop jeunes. Il nous était entre autres difficile d'admettre que les Français pouvaient abattre d'une rafale un combattant qui venait de se rendre, massacrer allègrement des femmes et des enfants et torturer ou mutiler des prisonniers vivants. » Bref à toutes les époques, la guerre dans le Rif a été sale et en face, la résistance héroïque.

A la fin du soulèvement, le Rif a été soumis à un régime militaire pour plusieurs années et l'héritage le plus ruineux de ce soulèvement fut la négligence complète et la marginalisation de la région par les autorités marocaines au cours des quatre décennies suivantes.

REVOLTE POPULAIRE A CASANBLANCA le 23 mars 1965

Pour comprendre le déclenchement de cette journée historique du 23 mars 1965, il faut remonter au début de ce mois de mars 1965, lorsque le ministre de l'Éducation, Youssef Belabès, publie une circulaire interdisant aux élèves âgés de plus de 16 ans de redoubler « le brevet » (l'équivalent de la troisième).

À l'époque, le mouvement des lycéens était très politisé. On lui reconnaissait une organisation, une certaine maturité politique, et il agissait par le biais de structures plus ou moins décentralisées : les amicales. Ses activités étaient en outre étroitement encadrées par la puissante Union nationale des étudiants du Maroc (UNEM). Cette structure de contestation agissait surtout dans les campus, mais elle était politiquement sous la tutelle de l'Union nationale des forces populaires (UNFP, parti d'opposition, fondé en 1959 par Mehdi Ben Barka). À la mi-mars donc, une délégation de l'UNEM prend contact avec les lycéens et les encourage à réagir en toute indépendance à la circulaire ministérielle.

Et le 22 mars 1965, l’étincelle a lieu : tout commence sur un terrain de foot, dans un établissement scolaire du centre de Casablanca : le lycée Mohammed-V. Il est à peine 10 heures et, déjà, le lieu du rendez-vous est noir de monde. « Il y avait au moins quinze mille lycéens. Je n'avais jamais vu un rassemblement d'adolescents aussi impressionnant », rapporte un témoin. Pour protester contre la circulaire du ministre, les « lycéens avaient décidé d'organiser une marche, sans plus, jusqu'au siège de la délégation de l'enseignement... » Objectif : attirer l'attention des autorités sur ce qu'ils considèrent comme une atteinte à un « droit national » inaliénable : le droit à l'enseignement public.

Mais lorsque les élèves atteignent le Centre culturel français, au centre de Casablanca, les forces de l'ordre décident d'intervenir pour disperser les manifestants. La répression pour disperser les lycéens est brutale (3 000 élèves arrêté au cours de cette seule journée), et ces derniers se sont alors dirigés vers les quartiers populaires et ont pu ainsi rallier les sans-emploi. » Chômeurs, lycéens et même simples passants se donnent rendez-vous le lendemain, sur le même terrain de foot.

Et effectivement, le 23 mars, du lycée Mohammed-V, les manifestants se dirigent vers Derb Soltane (quartier emblématique de la classe ouvrière de Casablanca), puis vers Bab Marrakech, dans la vieille ville. Mais, contrairement à la journée du 22, la manifestation n'est pas « pacifique » : la grève scolaire se transforme en manifestations et en émeutes destructrices. Autrement dit, il ne s'agit plus d'une « simple marche » : les magasins sont saccagés, les bus et les voitures brûlés par une foule de lycéens, de chômeurs, de passants et même de parents d'élèves. Toute la classe politique est prise au dépourvu par cette explosion de violence, les partis d’opposition, les syndicats tout autant que le gouvernement. Les autorités tentent même d’endiguer le mouvement de révolte mais sans résultat. Les manifestants ravagent et incendient des commissariats et attaquent des prisons de la ville.

En dépit du couvre-feu décrété par le gouvernement, les manifestations reprennent le 24 mars non seulement à Casa mais aussi à Rabat et à Fès. Et finalement c’est l’armée qui doit intervenir pour mettre fin à la révolte du peuple.

Ainsi, les manifestants se retrouvent rapidement face à l'armée. Les chars, amenés de Médiouna, ont traversé le grand boulevard de Casablanca qui coupe la ville en deux pour se déployer dans les grandes artères. À 15 heures, l'armée reçoit l'ordre de tirer sur les manifestants à balles réelles. « J'ai entendu un premier coup de feu, puis un deuxième et un troisième, mais je pensais qu'il s'agissait de balles de caoutchouc. Ce n'est qu'un peu plus tard que j'ai réalisé ce qui se passait... lorsque j'ai vu, autour de moi, tomber des camarades», poursuit le même témoin. Les slogans, ouvertement hostiles au roi Hassan II, le traitent d'« assassin », de « tyran »...


«Il s'agit à mon avis d'une révolte sociale, née d'un profond sentiment de désespoir et de déception. La foule pillait les magasins, et les édifices qui symbolisaient l'État étaient systématiquement détruits... Mais la répression de l'armée s'est exercée sans limites », rapporte un témoin.


Le nombre exact des victimes ? Il n'a jamais été connu : une dizaine de morts selon les autorités marocaines. Mais le bilan rapporté par la presse étrangère et certains militants de l'UNFP, qui fait état d'un peu plus de 1 000 morts, paraît plus probable. La plupart des victimes ont été enterrées dans des fosses communes. Selon des témoignages concordants, l'ordre a été rétabli en quelques heures, mais au prix d'une répression sanglante menée par le général Mohamed Oufkir, qui se verra conforté dans son statut d'homme de paille du roi.

Devenue une date symbole, la journée du 23 mars 1965 a entaché le début du règne du tyran Hassan II. Ces révoltes ont aussi marqué l’entrée sur la scène politique des jeunes et des déshérités des quartiers périphériques et des bidonvilles qui ont montré leur capacité à ébranler l’ordre établi. Ainsi, au cours du 23 mars 1965 et des jours suivants, le travailleur sans emploi est venu retrouver le paysan sans terre, l’élève et l’étudiant sans avenir. Ils se sont retrouvés dans la rue, réalisant l’étroite solidarité de leurs intérêts. Et c’est aussi en cela que ces journées sont historiques, par cette union des masses qui ont révélé une fois de plus leur conscience et leur détermination à arracher leurs droits par tous les moyens.


REVOLTE POPULAIRE A CASABLANCA le 20 JUIN 1981

Ces événements sanglants, par la violence des manifestations de rue et la répression sauvage qui s’en était suivie, restent un autre jalon essentiel de l’Histoire des luttes populaires au Maroc.

Lors de ces événements, des milliers de jeunes âgés de 17 à 25 ans ont été arrêtés et condamnés à de lourdes peines lors de procès expéditifs, dans une période, dans une ville comme Casablanca, où face à l’émeute, le pouvoir ne faisait pas dans la dentelle. Toutes les méthodes étaient permises pour étouffer la fureur de la population.

Tout commence le 28 mai avec l’augmentation brutale des prix des produits de première nécessité, de 14 à 77% pour le blé, l’huile, le sucre, le beurre, la farine… Du 28 au 31 mai, éclatent des émeutes à Oujda, à Berkane et à Nador après que l’UMT et la CDT eurent lancé une grève générale. Le 6 juin, le gouvernement de Maâti Bouabid fait marche arrière et annule 50% de certaines augmentations. Mais du 18 au 20 juin, une grève générale est décrétée par les deux syndicats UMT et CDT. Et l’après-midi du 20 juin, Casablanca est à feu et à sang. Face aux manifestations violentes, l’armée investit alors la ville et les arrestations se comptent par milliers.

L’état de siège est officiellement proclamé, les chars assiègent les rues et les hélicoptères survolent la ville. Les émeutes touchent la majorité des quartiers populaires de Casablanca. De nombreux symboles sont ciblés et saccagés par les émeutiers (agences bancaires, magasins, voitures de luxe, commissariats et véhicules de police, autobus et locaux des Forces auxiliaires). Bilan: 66 morts selon la version officielle, dont un Français tué sur l’autoroute. L’USFP parle de 637 morts, le PPS de 800 et les journaux étrangers de 600 à 1000 victimes et de 5000 arrestations. Des gens étaient parqués à la foire de Casablanca et dans certains casernes et commissariats. La répression fut donc terrible : les syndicats et partis sont suspendus ; les responsables et militants mis sous les verrous, dont 82 membres de l’AMDH et des enseignants ; les journaux saisis, voire interdits.

24 ans après, l’Instance Equité et Réconciliation (IER) mène des investigations sur ces événements car les langues se sont déliées. Ahmed Zarouf, capitaine de la gendarmerie en 1981 ayant participé à la répression, entendu par cette instance, révèle quelques vérités. Provenant de la bouche d’un officier, elles prennent toute leur force. Son témoignage devait en principe rester entouré de confidentialité, mais l’évolution des choses en a décidé autrement. Dans un entretien accordé à Maroc hebdo, le 23 décembre 2005, M. Zarouf raconte que 300 gendarmes avaient été appelés à la rescousse. Qu’ils étaient «équipés et bien entraînés» : une tenue ignifuge, des protège-tibias, des casques et des masques à gaz, des boucliers et des matraques, et des fusils anti-émeute de type anglais. «Les instructions que Driss Basri avait données étaient fermes et précises: réprimer les émeutes par tous les moyens. Il a même demandé s’il y avait assez de munitions pour cela», racontait-il. Et le capitaine de gendarmerie d’évoquer le massacre de Sidi Bernoussi dont beaucoup ont entendu parler. «J’ai été témoin, malgré moi, avoue-t-il, d’un événement regrettable. Au commissariat de Sidi Bernoussi, l’un des escadrons sur le terrain avait remis, comme le veut la procédure pénale, une centaine de jeunes. Par inadvertance, ces jeunes avaient été entassés dans un local de 10 m2 environ, sans aération. Plusieurs d’entre eux ont péri, étouffés».

Trente-trois ans après, les blessures d’une telle épreuve ne sont pas encore cicatrisées, ni pour les victimes encore vivantes de ces événements, ni pour les familles dont les enfants sont morts par les balles des forces de l’ordre, ou asphyxiés dans un commissariat et dont les corps n’ont jamais été retrouvés.

SOULEVEMENT POPULAIRE A NADOR, le 19 janvier 1984

Trois ans après les héroïques émeutes de Casablanca, provoquées par la hausse des prix de produits de première nécessité, ce fut au tour de la ville rifaine de NADOR de connaître ses propres manifestations populaires, mais aussi la violente répression et les arrestations massives qui vont avec.

En ce début de matinée du jeudi 19 janvier 1984, rien ne laisse penser qu'un drame est en train de se nouer dans la ville de Nador. Depuis quelques jours, ici comme un peu partout dans les collèges et lycées du pays, l'air est à la contestation. Une nouvelle mesure, accouchée par le ministère de l'Education nationale, oblige les étudiants à payer 50 DH pour s'inscrire à l'examen du baccalauréat et une centaine de dirhams pour intégrer les bancs de l'université. Les élèves, opposés à ce coup de canif dans la gratuité de l'enseignement public, font entendre leur mécontentement, via des grèves et des manifestations au sein des établissements scolaires, et ils scandent des slogans hostiles au ministère de l'Education et au Pouvoir.

Comment alors une simple fronde estudiantine s'est-elle transformée en émeute populaire ? Ce matin-là, l'ordre est donné aux forces de police de prendre d'assaut quelques collèges de la ville, poussant les occupants des lieux à sortir dans les rues. Une fois dehors, les jeunes manifestants sont rapidement rejoints par tout ce que compte la ville comme ouvriers, mais aussi comme chômeurs, pour qui l'occasion de s'insurger contre leurs conditions de vie était trop belle. La coupe était pleine. Non seulement une hausse des prix venait d'être annoncée, mais le gouvernement avait instauré quelques mois plus tôt un droit de passage, de 100 DH pour les piétons et de 500 DH pour les véhicules, pour tous les Nadoris désirant se rendre à Melilia. Sachant que la survie d'une bonne partie de la ville reposait sur la contrebande entre ces deux villes, la décision était une véritable bombe sociale.


Lors de son discours télévisé du 22 janvier 1984, dans lequel il qualifie les émeutiers de “awbach” (littéralement “déchets de la société”), Hassan II présente les événements non pas comme des manifestations populaires, mais comme “des manœuvres de déstabilisation”, visant à perturber la 4ème conférence au sommet des pays islamiques, qui se tenait la même semaine à Casablanca. Et parmi les coupables, le défunt souverain pointait du doigt les marxistes léninistes, “les services secrets sionistes” et… l'Iran. Ce dernier enfonce même le clou en menaçant les habitants de la région : “Vous avez connu le prince héritier (en référence aux événements de 1958-59 durant lesquels Moulay El Hassan avait violemment réprimé le soulèvement rifain), je ne vous conseille pas de faire connaissance avec Hassan II”.

Les manifestants, déboulant des quatre coins de la ville, convergent finalement vers l'avenue des Forces armées royales, artère principale de la ville. Et de débordement en débordement, les rassemblements se transforment en émeute : les manifestants cassent tout sur leur passage. Véhicules calcinés, commerces brûlés, écoles saccagées, vitres cassées… C'est la révolte qui s'installe en ville. Plus tard dans la journée, un communiqué du premier ministre de l'époque, Mohammed Karim El Amrani, fera état de 7 voitures, un car de police et 11 commerces brûlés, 20 voitures et 6 écoles endommagées…

L'intervention des forces de l'ordre ne se fera pas attendre. Dépassées par les événements et en sous-effectifs (le plus gros des troupes étant alors à Casablanca, pour assurer la sécurité du sommet de l'OCI), les forces déployées paniquent et arrosent la foule de balles réelles. Certains parlent même d'un hélicoptère, usant d'une mitrailleuse lourde à l'aveuglette pour disperser les manifestants - témoignage d’ailleurs confirmé par le journal espagnol, El Telegrama de Melilla, qui avait publié, dans son édition du 24 janvier, la photo d'un hélicoptère tirant sur des manifestants.

Beaucoup de Nadoris, très jeunes pour la plupart, tombent sous les balles ce jour-là. Officiellement, il y eut, en tout et pour tout, 16 morts, 37 blessés (dont 5 parmi les membres des forces de l'ordre). “Ces chiffres sont ridicules, démentent de témoins de l'époque. Il y a eu beaucoup plus de morts que ce que les autorités prétendent”. Le témoignage de Lahcen Ouchlikh est éloquent à ce sujet. Blessé durant l'émeute, ce dernier reprend connaissance in extremis dans ce qui s'apparente à une fosse commune, creusée à la hâte près de la caserne militaire de Taouima, dans la banlieue de la ville. Autour de lui, il jure avoir aperçu entre 70 et 80 cadavres. Un ancien policier de l'époque parle également de quelque 84 morts. Combien de victimes exactement ont fait les émeutes de Nador ? Difficile à dire. Les corps des manifestants tombés sous les balles ont été rapidement entassés dans des camions, pour être enterrés dans ladite fosse commune. Quant à ceux qui sont décédés dans les hôpitaux, il n'y a plus aucun moyen de les comptabiliser : les archives de cette année-là ont tout bonnement disparu.

Quant à ceux qui sont sortis indemnes de cette journée, ils n'imaginaient pas le calvaire qui les attendait. Dès le lendemain des émeutes, les renforts arrivent en masse dans la ville de Nador, essentiellement de la caserne militaire de Guercif. Une large campagne d'arrestations est alors entamée. Ils sont, d'après les estimations des ONG locales, près de 500 personnes à avoir été “arrêtées”. Beaucoup d'entre elles n'avaient même pas participé aux manifestations. C'est le cas de Benaïssa Belghiane, arrêté le 20 janvier 1984, alors qu'il n'avait pas quitté son lieu de travail la veille. Comme beaucoup d'autres, il a droit à deux semaines de séjour dans le sous-sol du commissariat central de Nador, subissant différentes formes de torture, avant de se voir condamner à 10 ans de prison ferme. Son beau-frère, de passage au Maroc, a beaucoup moins de chance. Une balle tirée par les militaires mit fin à sa vie. L'arbitraire a également frappé Mohamed El Ouard, qui se trouvait également sur son lieu de travail le jour des émeutes. Il est arrêté quelques jours plus tard. Verdict : 10 ans de prison ferme.

Pour un avocat de la ville, qui a défendu certains des inculpés, les procès n'étaient qu'une formalité. Sous le sceau de l'anonymat, il assure que “les jugements étaient orientés et les verdicts connus d'avance. Le gouverneur de l'époque s'était pratiquement installé dans le bureau du président du tribunal”. En clair, les autorités locales avaient besoin de boucs émissaires, de “victimes expiatoires”. “Hassan II était furieux que cela arrive en plein sommet de l'OCI, alors que les regards du monde entier étaient tournés en direction du Maroc, analyse un activiste associatif de la ville.

LEÇONS A TIRER DE CES EXPERIENCES DE LUTTE

ET DE RESISTANCE

Face aux luttes populaires engagées au Maroc durant toutes ces décennies, la réponse apportée par le régime réactionnaire marocain a toujours été la même : celle de la répression sanguinaire et de masse. Or face à cette barbarie mais surtout à cet héritage glorieux de la résistance du peuple au Maroc, il est essentiel de réaffirmer encore aujourd’hui que :

1) nous considérons que les soulèvements et les manifestations passés qui ont secoué l'ensemble du Maroc, sont l'expression authentique, spontanée et légitime de la lutte du peuple Marocain pour son émancipation et la transformation radicale de la société.

2) nous apportons notre soutien inconditionnel et sans réserve à ces luttes héroïques et aux aspirations légitimes qu'elles portent.

3) nous saluons respectueusement la mémoire de tous les martyrs du peuple Marocain.

4) nous dénonçons et combattons le régime réactionnaire Marocain, inféodé principalement à l’impérialisme français et nous le condamnons à assumer seul l'entière et la lourde responsabilité de ces massacres passés-présents tragiques.

5) Nous incriminons en ce sens sa politique, économique et sociale antipopulaire, antidémocratique et antinationale.

6) Nous dénonçons énergiquement la répression féroce dont ce régime sanguinaire use, à chaque fois, pour réprimer le peuple et ses révoltes justes et légitimes.

7) Nous appelons l'ensemble des révolutionnaires authentiques et des progressistes Marocains à unir leur force, à s'unir avec les masses pour combattre la misère et la répression et abattre un régime et un Etat qui exploitent, oppriment et assassinent le peuple.

8) Nous réaffirmons notre engagement et notre détermination à toujours être au côté du peuple Marocain dans ses luttes et dans ses combats, et ce jusqu'à la victoire et la réalisation de son projet de démocratie nouvelle.


VIVE LES LUTTES PASSEES ET PRESENTES DU PEUPLE MAROCAIN !

A BAS LE REGIME REACTIONNAIRE !

A BAS L’IMPERIALISME !

QUELQUES MARTYRS

DU PEUPLE MAROCAIN

Martyrs du peuple Marocain (de gauche à droite)

1ère ligne : Saïda MENEBHI - Najia ADAYA – Fadwa ELAROUI - Abdellatif ZEROUAL – Jbiha RAHAL - Amine TAHANI – Mustapha BELHOUARI – Bobker DOURAIDI

2ème ligne : Abdelhak CHBADA – Aït El Jaïd BENAISSA – Maati BOUMLI – Kamel HASNAOUI –Abderahman HASNAAOUI – Mohamed Taher SASSIAOUI – Mustapha MEZIANI – Nordine ABDELWAHAB

3ème ligne : Ahmed BENAMAR – Abderrazak ELGADIRI – Saïd AKROUH – Saïd BOUDEFT – Mustapha ELHAMZAOUI - Mehdi BEN BARKA – Omar BENJELOUNE – Mohamed GRINA

4ème ligne : Samir LBOUAZAOUI - Nabil JAAFAR - Jamal SALMI - Jawad BEN KADOUR - Aimad ALWALKADI - Karim CHAIB

La liste présentée ici n’est pas exhaustive car la liste des martyrs du peuple Marocain est bien longue… Et cette question à elle seule mériterait un dossier complet.

LE 14 NOVEMBRE 1974, ABDELLATIF ZAROUAL MOURAIT

DANS LES GEÔLES DE L’ETAT REACTIONNAIRE MAROCAIN

Abdellatif Zeroual était un dirigeant communiste internationaliste révolutionnaire, assassiné par ses tortionnaires dans la prison secrète de Derb Moulay Cherif, à Casablanca ; sa dernière parole fut : « je meurs pour ma patrie ! ».

Abdellatif Zeroual est né à Berrechid le 14 mai 1951. Devenu grand, il partit à Casablanca pour poursuivre ses études et obtint son baccalauréat. Il rejoignit alors l’Université de Lettres de Rabat, option philosophie – option pour laquelle il obtint sa licence. Il entra ensuite à l’Ecole supérieure de formation des Enseignants et il devint enseignant de philosophie.

Durant ses années d’étudiants, Abdellatif approfondit ses connaissances des œuvres de Marx, Engels, Lénine, Staline et Mao. Il participa aussi à l’organisation et à la formation des militants pour œuvrer à la construction d’un Maroc libre et démocratique.

Mais en s’engageant dans la lutte contre la répression que subissait le mouvement marxiste-léniniste Marocain, il fut contraint – alors qu’il était membre et dirigeant du bureau national de l’organisation marxiste-léniniste Il Al Amam (« En avant ») –d’entrer dans la clandestinité à partir de mai 1972 et durant l’été de cette même année, en étant en lien avec les autres cadres et militants de l’organisation, il se mit à faire le bilan des deux ans des luttes déjà menées par l’organisation. Ce débat continua aussi dans le cadre du secrétariat national de l’organisation et il en découla la fondation du noyau révolutionnaire professionnel pour faire face à la répression et pour organiser les militants et les actions de l’organisation.

Durant cette période, Abdellatif Zeroual fait parvenir un courrier à son père dans lequel il dit : « Père, peut-être aurai-je dû rester auprès de vous pour vous aider à subvenir à vos besoins, mais tu m’as fait révolutionnaire ! La situation de mon pays ne m’a pas laissé le choix : elle, aussi, a fait de moi cet authentique révolutionnaire que je suis… ».

Abdellatif, Mahmoud ou Rachid, et tous ses pseudonymes étaient ceux de ce militant et dirigeant révolutionnaire – un homme joyeux, déterminé et discipliné dans la lutte, et militant internationaliste qui répétait sans cesse : « notre tâche est de réaliser la révolution au Maroc mais sans l’isoler de notre tâche de la révolution arabe et de la révolution prolétarienne mondiale ! ». Il était aussi un militant qui chercha à unifier le mouvement en tentant sans relâche et avec persévérance à unifier les forces du mouvement marxiste-léniniste au Maroc.

Il fut finalement recherché. La police secrète du régime Marocain arrêta alors son père et le conduisit au centre de détention secret de Derb Moulay Cherif, à Casablanca ; il fut aussi question d’arrêter sa mère mais cette dernière dut son seul salut du fait qu’elle était cardiaque. Son père fut retenu en détention jusqu’à ce qu’Abdellatif Zeroual soit lui-même arrêté. Ce dernier fut alors torturé devant son père que les bourreaux menaçaient d’assassiner à tout instant. Le lendemain, le père de Zeroual fut finalement jeté d’une camionnette, les yeux bandés, dans une banlieue de Casablanca ; mais les tortionnaires, de leur côté, n’en avaient pas fini avec Zeroual et ils continuèrent à le torturer jusqu’à sa mort qui survint le 14 novembre 1974. Jusqu’à ce jour, sa famille n’a jamais pu revoir son corps.

LE 11 DECEMBRE 1977, SAïDA MENEBHI MOURAIT

DANS LES GEÔLES DE L’ETAT REACTIONNAIRE MAROCAIN

Saïda Menebhi naît en septembre 1952 à Marrakech. Alors qu’elle obtient son baccalauréat, elle part à l’université de Rabat, où elle étudie la littérature anglaise. Sur place, elle fait la connaissance de l’Union nationale des étudiants du Maroc (U.N.E.M.). Très vite, elle devient une militante active de ce syndicat étudiant, à travers sa composante communiste la Voie démocratique basiste, qui revendique notamment l’indépendance du Sahara occidental.

Parallèlement à sa formation universitaire, Saïda Menebhi commence aussi à enseigner l’anglais au collège de Rabat. C’est à cette période qu’elle intègre le syndicat de l’UMT (l’Union marocaine du travail), et qu’elle rejoint également le mouvement communiste marocain Ila al Amam (« En avant »), d’inspiration marxiste-léniniste.

Mais, le 16 janvier 1976, alors que la répression et les arrestations s’intensifient au Maroc, Saïda Menebhi et trois autres militantes sont arrêtées à Rabat, pour leurs activités politiques au sein d’Ila al Amam.

La jeune communiste, alors âgée de 24 ans, est enfermée au centre de détention de Derb Moulay Cherif, à Casablanca, réputé pour les sévices qui y sont pratiqués à l’encontre des prisonniers. Cette même année, Saïda Menebhi entame alors, en même temps que plusieurs autres militants, une première grève de la faim afin d’exiger la tenue d’un procès. Trois mois plus tard et après de nombreuses tortures physiques et psychologiques, Saïda Menebhi sera finalement présentée devant un juge d’instruction, avant d’être incarcérée à la prison Oukacha de Casablanca, dans l’attente de son jugement.

En janvier 1977, un an après son arrestation, elle comparaît, aux côtés de 138 autres inculpés, au procès de Casablanca. Tous seront jugés coupables et condamnés à cinq ans de prison pour atteinte à la sûreté de l’État. Durant le procès, Saïda Menebhi réaffirmera son soutien au peuple Sahraoui et à son indépendance. À la barre des accusés, elle dénoncera également l’oppression subie par les femmes marocaines dans tout le pays. Des propos qui lui vaudront les applaudissements de la salle, mais pour lesquels elle sera condamnée à deux ans d’incarcération supplémentaires pour injure à magistrat, en plus des cinq ans déjà écopés.

Tandis que les 138 condamnés sont incarcérés à la prison de Casablanca, quatre d’entre eux, dont Saïda Menebhi, vont être placés en isolement à la prison de Kenitra, au nord de Rabat.

Et le 10 novembre 1977, une nouvelle grève de la faim est lancée. Simultanément suivie par l’ensemble des condamnés du procès de Casablanca, dans leurs prisons respectives. Les grévistes réclament l’obtention du statut de prisonniers politiques, le respect des droits humains et des conditions de détention dignes, ainsi que la fin de l’isolement pour leurs quatre camarades. Cette nouvelle grève de la faim (la troisième depuis son arrestation) sera fatale à Saïda Menebhi. La jeune militante, dans un état de santé déjà critique, est transférée à l’hôpital Averroès de Casablanca. Mais face à son affaiblissement avancé, et par manque de soins appropriés, la Marocaine Saïda Menebhi, alors âgée de 25 ans, décède, le 11 décembre 1977, après 34 jours de grève de la faim.

Au Maroc, Saïda Menebhi est également connue pour avoir écrit de nombreux poèmes, avant et pendant ses années de prison, dans lesquels elle dénonçait le régime politique et parsemait ses convictions et son espoir d’une société meilleure.

La prison, c’est laid

Tu la dessines, mon enfant

Avec des traits noirs

Des barreaux et des grilles.

Tu imagines que c’est un lieu sans lumière,

Qui fait peur aux petits.

Aussi, pour l’indiquer

Tu dis que c’est là-bas.

Et tu montres avec ton petit doigt

Un point, un coin perdu

Que tu ne vois pas.

Peut-être la maîtresse t’a parlé

De prisons hideuses,

De maison de correction,

Où l’on met les méchants

Qui volent les enfants ?

Dans ta petite tête

S’est alors posé une question :

Comment et pourquoi,

Moi, qui suis pleine d’amour pour toi

Et tous les autres enfants,

Suis-je là-bas ?

Parce-que je veux que demain,

La prison ne soit plus là…

LE 24 AVRIL 1979, MOHAMED GRINA MOURAIT

DANS LES GEÔLES DE L’ETAT REACTIONNAIRE MAROCAIN

Le 30 mars 1979, Mohamed GRINA alors jeune lycéen, a organisé et a participé à la manifestation de commémoration de la journée de la Terre en solidarité avec la résistance du peuple Palestinien.

Suite à cette manifestation, on est venu l’arrêter, le 17 avril 1979, à l’intérieur même de son lycée et il a été présenté devant le tribunal le 23 avril 1979. Ce jour-là, la défense a demandé que le jeune Grina soit présenté devant des experts médicaux pour que soient constatés les sévices auxquels il avait été soumis durant ses jours de détention lors des séances de torture qu’il avait endurées et pour que soit aussi constaté l’état de santé très inquiétant dans lequel il se trouvait. Pourtant cette demande a été rejetée par le procureur du Roi et Mohamed Grina n’a alors pu bénéficier d’aucun soin d’urgence.

C’est ainsi que le lendemain, le 24 avril 1979, Mohamed GRINA est décédé une semaine après son arrestation.

LE 06 novembre 1985, AMINE TAHANI MOURAIT

DANS LES GEÔLES DE L’ETAT REACTIONNAIRE MAROCAIN

Le martyr Amine Tahani, l'un des dirigeants d'ILAL AMAM, l’organisation marxiste léniniste marocaine, est décédé sous la torture policière au centre secret de Derb Moulaya Cherif à Casablanca.

Il est né le 4 novembre 1956. Puis il devint lauréat de l'école Mohammedia d'ingénieurs de Rabat avant d’être employé en tant qu’ingénieur - à la SAMIR, la seule raffinerie de pétrole au Maroc.

C’est aussi à cette époque qu’il devient un des cadres communistes d'ILAL AMAM et qu’il milita activement avant de se faire arrêté en novembre1985. Il fut alors torturé jusqu'à la mort.

D’AUTRES EXEMPLES DE MILITANTS ASSASSINES

PAR L’ETAT REACTIONNAIRE MAROCAIN

¨ Parmi les Militants Etudiants assassinés

Abdelrazak ELGADIRI

assassiné le 29 décembre 2008

Abderrazak ELGADIRI : né le 28 juillet 1987 à Marrakech, il était étudiant en seconde année à l'université Caddy Ayyad. En tant que membre de la Voie Démocratique Basiste, l'organisation marxiste-léniniste-maoïste en lutte au Maroc, il a participé à la grande manifestation populaire de soutien au peuple palestinien de Gaza. Cette manifestation, qui a eu lieu le samedi 27 décembre 2008, à Marrakech, était la première sur le plan international, et était organisée à l'appel de la Voie Démocratique Basiste (VDB) et de l'Union Nationale des Etudiant du Maroc (UNEM).

Ces deux organisations, à l'histoire et l'identité liées, ont très bien compris que les gouvernants arabes manipulaient les masses en parlant de Palestine, alors qu'en réalité ils sont liés à l'impérialisme et au sionisme.

Ce fameux 27 décembre 2008, le régime a lancé ses sbires pour réprimer la manifestation qui a donc donné lieu à une confrontation entre les forces de répression et le cortège pour la Palestine.

Le lendemain, à Bâb Doukala - c'est-à-dire dans le centre ville de Marrakech -, était organisé un rassemblement contre cette répression et pour la Palestine, toujours sous la direction de la VDB.

Là encore le régime a montré sa nature, en lançant une nouvelle fois la répression, faisant 18 blessés, notamment Mohammed, victime d'une double fracture du crâne, et Abderrazak ELGADIRI, finalement décédé à quatre heures du matin le lundi 29 décembre. Avant lui, déjà Zoubida KHALIFA et Adil AJRAOUI étaient tombés en 1987, également lors d'une manifestation de soutien à la Palestine.

Le régime a tenté de masquer son crime, en passant sous silence la mort d'Abderrazak ELGADIRI, en essayant de cacher le cadavre et de l'enterrer de manière discrète et anonyme, mais ses camarades de lutte ont su empêcher ce plan manigancé à l'hôpital Ibn Tofail.

Abderrazak ELGADIRI s'était inscrit en faculté en 2007-2008, année de bataille contre la privatisation de l'enseignement. Il avait été en première ligne dans la résistance de la mi-mai 2008, où le régime avait pris d'assaut les étudiants en révolte. Il avait été de toutes les étapes de la révolte au sein de l'université, dans le cadre des luttes de l'UNEM (la reprise de la cité universitaire par les étudiants, la confrontation avec les forces de répression, le boycott des examens, la lutte contre la torture subie par les prisonniers politiques...), suivant la ligne de la Voie Démocratique Basiste.

Abderrazak ELGADIRI est tombé en martyr, pour la cause des ouvriers et des paysans du Maroc, mais également pour celle de la Palestine, car la cause palestinienne est considérée comme une cause nationale.

¨ Parmi les Militants assassinés d’organisations politiques

Mountassir BRIBRI

Le martyr Mountassir BRIBRI est né en 1965, à Salé, près de Rabat. Il a grandi dans un milieu familial imprégné par la lutte et la résistance contre le colonialisme français et ses valets. Il a rejoint, dans les années 1970, la lutte clandestine en devenant un militant actif de l’organisation marxiste-léniniste-maoïste nommée « Servir le peuple ». Il s’est vite fait reconnaître par sa détermination et son abnégation ainsi que par sa volonté de rester en lien avec les travailleurs, les élèves et les étudiants. C’est ainsi qu’il a eu une influence importante au sein de leurs organisations et dans les quartiers populaires, aussi bien à Casablanca qu’à Mohamedia.

Il était aussi connu pour ses diverses initiatives visant à apporter un soutien effectif à la résistance du peuple Palestinien.

Mountassir BRIBRI fut un militant solide et vigilant : il évita à maintes reprises d’être arrêté – jusqu’à ce jour du lundi 8 février 1983, où il fut assassiné avec pour version officiel un simple accident de train.

¨ Parmi les Militants de l’ANDCM assassinés

L’histoire de l’ANDCM (Association Nationale des Diplômés chômeurs au Maroc) est une histoire pleine de répression : prison, bastonnades, amendes, détentions et jugements iniques, exercés sur l’association et ses militants dans leur combat pour le droit au travail et à s’organiser librement.

Mustafa EL HAMZAOUI Najia ADAYA Kamel HASNAOUI

assassiné le 16 mai 1993 assassiné le 11 décembre 2000 assassiné le 3 avril 2011

L’ANDCM a fait du 16 mai une journée qui maintient vivante la flamme de la lutte pour laquelle Mustafa EL HAMZAOUI a livrée sa vie. En effet, le 16 mai 1993, Mustafa EL HAMZAOUI - militant de l’Association Nationale des Diplômés/ées en Chômage du Maroc (ANDCM) de Khenifra - a été kidnappé par la police, torturé et assassiné dans le commissariat de police de Khenifra, sans que jusqu’à aujourd’hui on ait éclairci les faits, trouvé sa tombe et puni les coupables de ce meurtre.

En outre, l’association nationales des diplômés chômeurs au Maroc demande encore aujourd’hui à l’Etat réactionnaire Marocain que soient jugés les responsables de l’assassinat de Najia ADAYA tuée le 11 décembre 2000 et d’un autre militant de l’association Kamel HASNAOUI assassiné le 3 avril 2011 à BENI BOUAYACH (Nord du Maroc).

Najia ADAYA est née en 1966, à Zaouiat Sidi Abdeslam – village près de la ville d’IFRANE – où elle a mené ses études jusqu’au baccalauréat ; puis elle a poursuivi ses études universitaires à l’Université de Moulay Ismail de Lettres et de Sciences sociales à Meknès où elle a obtenu sa licence de langue arabe et littérature en 1993.

C’est alors qu’elle s’est fait connaître en tant que militante déterminée au sein de l’UNEM où elle a milité de 1987 jusqu’en 1993. C’est à partir de cette date, qu’elle a ensuite continué à militer dans le cadre de l’Association Nationale des Diplômés Chômeurs au Maroc. Elle a alors assumé plusieurs responsabilités à l’intérieur de la structure de l’association sur le plan régional et national : ainsi, elle a été présidente de la section d’IFRANE, membre du comité régional et aussi membre du conseil national jusqu’au jour de sa mort, le 11 décembre 2000.

Ce fameux jour, elle se dirigeait vers le parlement pour participer à un rassemblement de commémoration du 23ème anniversaire de la mort de la grande militante Saida Menebhi ; or, très vite, ce rassemblement a été réprimé dans un bain de sang – obligeant les manifestants à fuir. Najia et ses camarades - poursuivis par les forces de répression - se sont alors retrouvés encerclés sur les falaises en bord de mer et Najia n’a pas eu d’autre échappatoire que de se jeter à la mer. Aucun secours ne lui a été apporté et son corps a alors été emporté par les vagues. Son cadavre n’est réapparu que plusieurs mois plus tard dans la région de Mehdia.

¨ Parmi les Militants du Mouvement du 20 février assassinés

Kamal AMMARI - Ce militant du mouvement du 20 février est décédé le jeudi 2 juin 2011, à SAFI, 4 jours après avoir été passé à tabac par les forces de répression.

Selon des témoins présents sur les lieux, ce militant du Mouvement du 20 février a bel et bien été tabassé lors de la manifestation du 29 mai 2011, à Safi, par huit éléments de la police et de la BLIR (Brigade légère d’intervention rapide), pendant « 7 minutes » non-stop. Kamal AMMARI comptait participer à cette manifestation, avant d’aller à son travail à 20h, et c’est alors qu’il a été abordé par les éléments de la police qui lui ont demandé s’il faisait partie du Mouvement du 20 février. Question à laquelle il a répondu « oui » spontanément. Ensuite, tout est allé très vite, sous les yeux ahuris de plusieurs manifestants et de simples badauds.

Plusieurs manifestants ont été appréhendés, kidnappés et séquestrés, toujours selon des témoignages qui se rejoignent, passés à tabac dans des véhicules banalisés et non-banalisés, puis jetés pour la plupart à plusieurs kilomètres plus loin de cercle urbain de Safi, dans un état indescriptible (dents cassées, côtes brisées, n’arrivant plus à marcher…).

Selon le rapport d’expertise, le lien de causalité entre la violence subie par Kamal Ammari et son décès est évident : « les coups et violences injustifiées infligées à Kamal Ammari […] sont la cause directe de la dégradation de sa santé qui mènera à sa mort ».

9 autres militants sont morts directement du fait de leur participation aux événements et aux protestations organisés par le mouvement 20 Février.

1. Karim CHAIB, 21 ans, Sefrou, le 20 Février 2011
2. Imad ALQADI, 18 ans, Al Hoceima, le 20 Février2011
3. Jawad BENQADDOUR, 25 ans, Al Hoceima, le 20 Février2011
4. Jamal SALMI, 24 ans, Al Hoceima, le 20 Février 2011
5. Samir LBOUAZAOUI, 17 ans, Al Hoceima, le 20 Février 2011
6. Nabil JAAFAR, 19 ans, Al Hoceima, le 20 Février 2011
7. Fadwa LAAROUI, 20 ans, Souq Sebt, le 21 Février 2011
8. Mohamed BOUDOUROUA, 38 ans, Safi, 13 Octobre 2011
9. Kamal HUSSAINI, Aït Bouayach, 27 Octobre 2011

LES GREVISTES DE LA FAIM MORTS

DANS LES GEÔLES DE L’ETAT REACTIONNAIRE MAROCAIN

Mustapha BELHOUARI Boubker DOURAIDI Abdelhak CHBADA

Mort le 28 août 1984 mort le 29 août 1984 mort en août 1989

La grève de la faim est souvent le seul moyen dont disposent les centaines de prisonniers politiques incarcérés dans les geôles Marocaines pour protester contre leur détention, les tortures et les mauvais traitements qui leur sont infligés, ainsi que pour réclamer une amélioration de leurs conditions de vie. Ce n'est qu'en observant une série de grèves de la faim que les prisonniers politiques peuvent résister et réussir au fil des mois à obtenir une amélioration de leurs conditions de détention. Et ce même si le prix de ces luttes peut être lourd et entraîné la mort.

Ainsi, souvenons-nous du combat mené à partir du 4 juillet 1984 par les militants du groupe de Marrakech engagés dans une grève de la faim longue pour protester contre la dureté de leurs conditions de détention et l'absence de soins médicaux après les séances de torture qu’ils avaient dû endurées. Cette grève héroïque fit deux martyrs : Boubker DOURAIDI et Mustapha BELHOUARI, deux de ces prisonniers politiques détenus, morts à l'hôpital respectivement le 28 et le 29 août 1984. Deux autres prisonniers appartenant au même groupe et qui avaient entamé une grève de la faim illimitée en 1985, l'ont poursuivie jusqu'à leur libération, en 1991. Ces deux hommes, attachés sur leur lit dans des chambres séparées de l'hôpital Averroès à Casablanca, ont été nourris de force pendant six ans au moyen de sondes gastriques.

Rappelons-nous aussi d’Abdelhak CHBADA, également prisonnier politique, qui est mort quant à lui en août 1989, un mois avant la date prévue de sa libération. Cet homme et trois autres détenus de la prison de Laalou, à Rabat, avaient entamé en juin 1989 une grève de la faim ; les trois autres l'ont poursuivie jusqu'en février 1990.

Les prisonniers politiques, depuis lors, ont continué de protester contre leur maintien en détention et la dureté de leurs conditions carcérales en observant des grèves de la faim. C'est ainsi qu’en 1993, des prisonniers politiques détenus dans plusieurs établissements ont résisté de cette manière pour protester contre la détérioration de leurs conditions de détention après la nomination d'un nouveau directeur de l'administration pénitentiaire en 1992. Ils dénonçaient notamment la suppression des visites de leurs familles, droit qu'ils avaient acquis à l'issue de grèves de la faim prolongées et répétées, ainsi que la restriction des soins médicaux.

Mustapha MEZIANI

mort le 13 août 2014

Et ce sont encore pour ces mêmes revendications que résistent encore aujourd’hui les prisonniers politiques incarcérés dans les geôles de la réaction Marocaine, en 2015. Preuve en est du combat mené notamment par des militants du mouvement estudiantin, incarcérés après les vastes mouvements de lutte populaire déclenchés en particulier au sein des universités pour s’opposer à la privatisation de l’enseignement et exiger l’amélioration des conditions des étudiants ainsi que la défense des libertés politiques et syndicales. Dans ce contexte, nombreux sont les étudiants qui ont été arrêtés et condamnés à de lourdes peines lors de procès montés de toutes pièces. Et nombreux sont aussi ceux qui parmi eux, ont entamé des grèves de la faim répétées pour dénoncer les exactions et les agressions physiques et morales qu’ils subissaient au quotidien dans les geôles de la réaction et pour faire aboutir et imposer leurs revendications justes et légitimes pour des conditions de détention dignes. Or, ces mouvements de résistance héroïque actuels ont eux aussi leur lot de martyrs : en effet, le régime réactionnaire en refusant de reconnaître leurs droits les plus élémentaires, pousse ces militants révolutionnaires les plus déterminés à la grève de la faim et les assassine à petit feu, comme cela a été le cas pour le militant Mustapha MEZIANI, décédé le 13 août 2014 après 72 jours de grève de la faim.

LA POLITIQUE DES DISPARITIONS FORCEES

DE L’ETAT REACTIONNAIRE MAROCAIN

¨ Etat des lieux

Le régime réactionnaire Marocain a eu recours à une politique de disparitions forcées notamment contre des opposants politiques Marocains. Cette politique visait des personnes enlevées en raison de leurs engagement et activités politiques.

Parents et amis des disparus au Maroc

Dès le début des années soixante, et de manière plus massive dans les années 1970 et 1980, les autorités marocaines ont eu recours à la pratique des disparitions forcées pour faire taire les mouvements d'opposition. De manière systématique, les membres des divers groupes politiques d'opposition étaient enlevés et détenus illégalement dans des centres secrets de détention : Dar Al Mokri et le lieu-dit "le complexe" à Rabat, le commissariat de Derb Moulay Chérif à Casablanca, etc. Des casernes désaffectées ou toujours en activité, des fermes et des villas ainsi que les hangars de l'aéroport d'Anfa, près de Casablanca ont aussi servi de centres de détention pour des périodes allant de quelques semaines à des années parfois. Afin de préserver leur caractère secret, plusieurs centres étaient désignés par les services de sécurité sous le vocable de PF 1, PF 2, etc., pour Point Fixe 1, Point Fixe 2,…

Durant les années 1970, un centre, situé à Rabat, en face de l'hôpital Ibn Sinna, était réservé aux Marocains vivant à l'étranger, enlevés à leur retour au Maroc et détenus, parfois durant des années, sans jamais être présentés à la justice. Durant les années soixante-dix, plusieurs syndicalistes et militants marocains vivant en France ou dans d'autres pays d'Europe ont été arrêtés à l'occasion de leurs vacances et détenus dans ce centre.

Pour certaines victimes des disparitions, et notamment les membres des groupes d'opposition, ce passage par les centres de détention précédait souvent un jugement. Obligés de signer des aveux extorqués sous la torture, ils étaient déférés à la justice après quelques semaines ou quelques mois de détention secrète.

D'autres victimes étaient libérées après une période plus ou moins longue de détention, sans que la justice ne soit à aucun moment saisie : il en a été ainsi de plusieurs centaines de personnes arrêtées en mars 1973, après le déclenchement d'une guérilla, très rapidement vaincue, dans les montagnes de l'Atlas.

Selon le témoignage de M. Hadj Ali Elmanouzi, - enlevé lui-même une première fois, en 1970, avec dix-huit membres de sa famille, détenu au commissariat de Derb Moulay Chérif et dont un des fils, Hocine, est toujours porté disparu - quatre hangars de l'aéroport d'Anfa ont servi en 1973 à la détention illégale de près de 1000 personnes, arrêtées après ces événements. Comme dans la plupart des centres de détention, les victimes avaient en permanence les mains menottées et les yeux bandés, avaient l'interdiction de parler et devaient rester couchées tout le temps de leur détention.

A quelques reprises enfin, des opposants politiques, emprisonnés après une première période de disparition, ont été enlevés de l'intérieur même des prisons et emmenés à nouveau dans des centres de détention secrète. Ce fut aussi le sort des militaires, condamnés après les tentatives de coup d'état de 1971 et 1972 et qui purgeaient leurs peines à la prison militaire de Kénitra. En août 1973, ils furent emmenés au bagne de Tazmamart, une caserne militaire, où ils restèrent détenus, coupés du monde, sans soins et dans des conditions atroces. Plusieurs d'entre eux, morts en détention, furent enterrés dans la cour même de la caserne.

On demeure sans nouvelles de plusieurs centaines de personnes et quelques cas d'enlèvements sont encore rapportés jusqu’à aujourd’hui. Ainsi, Mohamed Esslami, a disparu à Rabat le 29 novembre 1997, deux jours après la soutenance d'une thèse en médecine. Sympathisant d'un parti d'opposition, le PADS (Parti de l’avant-garde démocratique et socialiste), Mohamed Esslami avait déjà été arrêté trois jours durant en 1993, en raison de ses activités au sein du syndicat étudiant, l'UNEM (Union nationale des étudiants du Maroc).

La question des disparitions est aussi liée à la lutte pour le Sahara Occidental, puisqu'un grand nombre de disparus l'ont été aussi dans le contexte du conflit qui a opposé à partir de 1975 le régime Marocaine au Front Polisario, qui revendique l'indépendance du Sahara. Ainsi, dans le périmètre du Sahara Occidental, 76 personnes sont encore aujourd’hui portées disparues : leur sort reste totalement inconnu puisque le régime ne fournit aucun renseignement à leur sujet. On dénombre aussi un autre groupe de 378 personnes se décomposant de la manière suivante : 321 personnes disparues et libérées en 1991. Parmi ces 321 personnes, 73 étaient des femmes (19 allaitant au moment de leur enlèvement). 57 autres personnes sont elles décédées en détention secrète. Enfin un troisième groupe de personnes (815) est constitué de personnes disparues et réapparues au fil des ans.

Plusieurs vagues de libérations ont démasqué, aux yeux de tous, la barbarie de ce régime qui jusque-là a toujours nié ce phénomène de disparitions massives. Et pourtant :

-en décembre 1984, six "disparus" marocains ont été libérés du centre de détention secrète de Qala'at M'Gouna après avoir été portés "disparus" pendant 10 ans.

- en juin 1991. 321détenus sahraouis, portés "disparus" pendant, parfois, près de 16 ans ont été libérés des centres de détention secrète de Qal'at M'Gouna, de la caserne CMI de Laayoune et d'Agdz.

- en fin d'année 1991 est survenue la libération de 28 personnes de nationalité marocaine et des 3 frères Bourequat, de nationalité française, tous détenus dans la caserne de Tazmamart. Ces personnes avaient été portées "disparues" durant 18 années.

- enfin, en 1994, le décès de 34 personnes disparues - dont 30 faisaient partie des personnes séquestrées au centre de Tazmamart - est annoncé officiellement par le régime.

Le mode opératoire des arrestations, la population ciblée et l'importance quantitative des arrestations montrent que ces disparitions forcées relevaient d'une pratique généralisée tendant à terroriser toute une frange de la population qui n'était pas acquise.

Le nombre de personnes victimes de disparitions forcées reste encore ouvert aujourd’hui : les chiffres évoluent entre près de 600 jusqu'à deux à trois milles. A cet égard, il faut souligner la situation particulière qui prévaut au Sahara Occidental où on évalue à près de 1500 personnes environ le nombre de victimes de disparitions forcées.

Des familles sont encore aujourd’hui dans l'ignorance du sort exact de leurs proches ou elles ne peuvent toujours pas procéder à l'inhumation des dépouilles des personnes dont le décès est avéré.

¨ Parmi les disparus

9 cas de disparus n’ont connu aucune avancée en ce qui concerne la vérité sur leur sort : Abdelhak ROUISSI, Mehdi BEN BERKA, Hocine MANOUZI, Atkou AHMED BEN ALI, Agoudar EL YAZID, Omar EL WASSOULI, Salhi MADANI, Mohammed ES-SLAMI, Abderrahmane DEROUICH

Abdelhak ROUISSI a disparu le 4 octobre 1964, six jours avant son vingt-cinquième anniversaire. Il était employé à la Banque du Maroc à Casablanca. Il appartenait à une famille patriotique plutôt aisée. Son père, qui avait tâté de la prison sous le protectorat, avait mis une maison à la disposition du Parti démocratique de l'indépendance (PDI). Ses idées étaient celles de la gauche à l'époque : il était contre la « Constitution octroyée » en décembre 1962, n'approuvait point la « guerre des Sables » avec l'Algérie en octobre 1963, participait aux grèves de l'Union marocaine du travail (UMT). Deux semaines avant sa disparition, il avait été convoqué au commissariat. On lui avait lancé un avertissement laconique : « Occupe-toi de tes oignons ! » Sans plus d'explication. Un lundi, il ne se rend pas à son travail. Son père l'apprend le lendemain et prévient aussitôt la police. On visite l'appartement pour découvrir qu'il avait été mis à sac. On trouve aussi des traces de sang. La police place les scellés, déclare qu'elle ouvre une enquête. Une plainte est déposée. Plus rien depuis.

Le 29 octobre 1965 à 12h30, Mehdi BEN BARKA est enlevé par deux policiers français, Louis Souchon et Roger Voitot, devant la brasserie Lipp, à Paris. L'opposant au régime marocain avait rendez-vous avec des cinéastes, Philippe Bernier, réalisateur, et Georges Figon, producteur, pour un projet de films sur la décolonisation. Il n'a pas réapparu et son corps n'a jamais été retrouvé.

Le 29 octobre 1972, Hocine EL-MANOUZI, jeune marocain de vingt neuf ans est enlevé à Tunis par les services de sécurité marocains, alors qu’il est de passage dans la capitale tunisienne. D’après certains témoignages, Houcine aurait ensuite été ramené au Maroc et placé en détention au Point fixe 3 (PF3), un centre de détention aujourd’hui détruit et réputé comme haut lieu de la torture. Le 12 juillet 1975, Houcine parvient à s’évader du PF3 et est à nouveau arrêté et reconduit au PF3 le 19 juillet. Depuis, plus aucune trace de lui depuis donc plus de 43 ans.

Omar EL WASSOULI est né en 1955 à Jorf (province d'Er-Rachidia) au sud est du Maroc. Il a poursuit ses études primaires à Jorf, puis au collège à Erfoud et enfin au lycée de Meknès. Là, il a eu son baccalauréat option Sciences expérimentales en 1975 puis il s'est inscrit à l'E.N.A (école nationale d'agriculture à Meknès). Enfin, il a obtenu son diplôme d'ingénieur agricole (techniques et développements) en 1979.

A cette époque, il était membre actif au sein de l'association des étudiants de l'E.N.A et membre du bureau de l'association pendant l'année 1977-1978. Il militait au sein du courant des étudiants progressistes (les Basistes) proche des organisations marxistes-léninistes pour la levée de l'interdiction de l'U.N.E.M.

En 1979 il a été nommé ingénieur agricole à la Direction Provinciale d'Agriculture à Kénifra. Et en parallèle, il a milité au sein d'une association culturelle dans la même ville et a participé à l'encadrement des agriculteurs pour revendiquer leurs droits.

C’est alors qu’il a été sujet à plusieurs menaces policières. Voici quelques passages d'une lettre qu’il a envoyée à sa famille en 1983 qui laisse fortement à penser que l’Etat réactionnaire marocain est responsable de sa disparition forcée.

" En octobre 1980, alors que j'essayais de régler le problème de mutation (et ceci après les multitudes menaces de la police secrète marocaine) je fus surpris par le blocage de mon compte bancaire orchestré par les autorités marocaines.... J'ai été convoqué à Rabat ... Là, j'ai été conduit à un endroit secret de torture où je suis resté 27 jours en subissant toutes formes de tortures physiques et morales.... J'ai été relâché sous condition – celle de devoir rester à Rabat et de me présenter aux autorités tous les jours à 8 heure du matin et à 8 heure du soir pour signer ma déclaration de présence... Entre temps, le directeur du D.P.A de Meknès avait envoyé 3 convocations sur le lieu de mon travail à Kénifra et une quatrième me prévint que j'étais exclu de mon travail du fait mon absence... Je suis allé à la Direction de la Sûreté Nationale et je leur ai raconté mes problèmes au travail mais ils ont prétendu qu'ils ne m'avaient jamais vu et ils m'ont menacé de m'incarcérer si je revenais encore ".

En février 1983, Omar EL WASSOULI réussit finalement à obtenir un emploi au bureau d'étude I.T.E.C.O à Agadir, après avoir passé une année en France pour préparer un diplôme de docteur ingénieur. Il a travaillé à ce poste jusqu'à 1984 - date de sa disparition forcée.

Le 15 octobre 1998, le C.C.D.H (conseil consultatif des droits de l'homme) organisme de l’Etat réactionnaire marocain, a publié une première liste de 112 disparus. Omar EL OUASSOULI y figurait comme étant vivant et se trouvant à l'étranger, mais sans qu’aucune preuve n’ait été donnée jusqu’à ce jour et sans que le mystère de sa disparition n’ait été levé.

DES MILITANTS ASSASSINES

PAR LES ORGANISATIONS INTEGRISTES,

BRAS DROIT DE L’ETAT REACTIONNAIRE

Omar Benjelloun

Casablanca, le 18 décembre 1975. Il est 15h et nous sommes à proximité du 91, rue Camille Desmoulins (aujourd’hui boulevard Al Massira Al Khadra), la célèbre avenue commerçante de la ville blanche. Omar Benjelloun, la quarantaine, quitte son domicile et se dirige vers sa voiture. Deux inconnus l’attendent et l’abordent sans crier gare.

Des propos sont échangés entre les trois hommes, non loin d’un policier qui régule tranquillement la circulation. Les deux assaillants, qui ont bien planifié leur coup, sortent en une fraction de seconde un arsenal d’armes artisanales : un couteau, un tournevis, une manivelle, etc. Une pluie de frappes d’une rare violence s’abat sur Omar Benjelloun. Il prend un premier coup à la poitrine, un deuxième au dos et un troisième à la tête, qui lui sera fatal. Il est à terre, inerte et git dans une mare de sang. Mort.

Omar Benjelloun était un syndicaliste, ingénieur, avocat et journaliste. Mostafa Khezzar, l’un des deux assaillants, est arrêté sur place par des passants. Ahmed Saâd, son complice, est appréhendé deux jours plus tard. Les deux assassins sont présentés comme étant des membres de la Chabiba Islamiya (la jeunesse islamiste).

Maâti Boumli

Maâti Boumli - Début novembre 1991, les habitants du quartier Al Qods à Oujda se sont réveillés sur un crime abject et odieux. Un jeune homme a été trouvé mort. Les criminels n'avaient pas oublié de signer leur acte à travers des tatouages sur le corps de cet étudiant de 20 ans. Les étudiants et surtout les militants de l'UNEM résidant dans ce quartier allaient découvrir qu'il s'agissait de Maâti Boumli, enlevé le 31 octobre par les sbires d'Al Adl Wa Al Ihsane (Justice et bienfaisance).

Un commando avait, en effet, investi ce jour le campus universitaire, s'était introduit dans la salle des TP de la Faculté des sciences, et kidnappé Maâti devant ses professeurs et camarades. Tout au long du chemin vers le quartier d'Al Qods, Maâti Boumli criait à haute voix : «Ils veulent me tuer». En vain. Même les forces de l'ordre toujours basées aux environs du campus n'étaient pas intervenues.

L'autopsie a révélé que les criminels avaient sectionné les veines de ce natif d'Oued Bared de Taza. La police avait, à l'époque, mis la main sur des bouteilles contenant du sang et des photos d'autres étudiants, cibles potentielles d'autres opérations. L'acte était la traduction dans les faits d'une «Fatwa» édictée par un «conseil des soldats de Dieu». Une douzaine d'étudiants de ce mouvement extrémiste avaient été arrêtés et condamnés à vingt ans de prison ferme. Le corps de cet étudiant en branche physique-chimie, a été enterré dans un endroit secret. Sa famille, ses amis, ses camarades veulent aujourd'hui connaître l'endroit où les autorités ont enterré sa dépouille.

Benaïssa Aït El Jid

Benaïssa Aït El Jid - Le 25 février 1993, dans l'un des quartiers jouxtant l'Université Mohammed Benabdellah, plusieurs personnes, armées, avaient arrêté le taxi qui transportait Benaïssa Aït El Jid. Ce dernier avait été extrait de force du véhicule puis sauvagement battu et laissé pour mort dans la rue. Plusieurs jours de coma plus tard, Benaïssa rendra l'âme aux urgences de l'hôpital Ghissassi, les médecins n'ayant rien pu faire. Dès le début, les étudiants d'Al Adl Wa Al Ihsane (Justice et bienfaisance) avaient été montrés du doigt, surtout qu'ils avaient, durant cette même période, multiplié les raids contre les étudiants révolutionnaires de l'Université de Fès.

LA RESISTANCE VICTORIEUSE

DES PRISONNIERS REVOLUTIONNAIRES

FACE A L’ETAT REACTIONNAIRE MAROCAIN

COMMUNIQUE A L’OPINION NATIONALE ET INTERNATIONALE

GREVE DE LA FAIM ILLIMITEE MENEE PAR LE GROUPE

DES PRISONNIERS POLITIQUES AZIZ ELKHALFAOUI ET AZIZ ELBOUR,

DES PRISONS LOCALES DE BOULMHAREZ ET DE L’OUDAIA DE MARRAKECH

Nous poursuivons la bataille que nous menons au sein des prisons locales de BOULMHAREZ et de l’OUDAIA de MARRAKECH, contre les réalités catastrophiques dans lesquelles nous vivons et pour faire face au refus systématique de l’administration pénitentiaire de voir nos revendications réalisées, et ce malgré plusieurs grèves de la faim que nous avons menées.

Nous dénonçons aussi les harcèlements et les menaces quotidiens auxquels nous sommes confrontés tous les jours à l'intérieur de nos prisons – que ce soit sous la forme d'insultes, de brimades, d’agressions physiques faits par les gardiens, les fonctionnaires, les directeurs et les présidents de nos prisons.

Nous détenus politiques maoïstes avons décidé détenus de nous engager dans une nouvelle étape de résistance en menant une nouvelle grève de la faim illimitée pour le groupe d’Aziz ELKHALFAOUI et une autre de trois jours pour le groupe d’Aziz ELBOUR renouvelable si nécessaire. Ces grèves commenceront le lundi 23 Mars 2015 en mémoire du glorieux soulèvement du 23 Mars 1965 ; par-là, nous chercherons à imposer nos revendications justes et légitimes de l'intérieur de la prison.

Nos revendications sont les suivantes :

- notre libération et celle de tous les prisonniers politiques sans condition.

- l’abandon des charges et les poursuites montées de toutes pièces contre nous.

- l’abandon des poursuites contre nos camarades sans condition aucune.

- l’abandon de la militarisation de l'université et l’abandon pur et simple de la circulaire tripartite.

- l’autorisation du droit de visite pour nos familles, pour les étudiants et pour tous ceux qui veulent nous rendre visite durant toute la semaine.

- l’amélioration des régimes alimentaires, le droit et l’accès au soin, à la santé et à l'hygiène.

- la fourniture de livres et le libre accès aux livres de référence, aux journaux et à tout ce qui contribuer à l'étude.

- l’autorisation de s’inscrire au baccalauréat, au master et à la licence professionnelle.

- l’autorisation d’une utilisation libre du téléphone pour pouvoir communiquer avec l’extérieur.

- l’autorisation aux promenades sur un temps suffisant et propice.

- le regroupement des prisonniers politiques dans une seule prison et dans les mêmes cellules.

- la fin de tout harcèlement et de toutes mesures d’exactions auxquels nous sommes exposés au quotidien.

Enfin, nous déclarons à l'opinion nationale et internationale notre entière solidarité:

- avec toutes les luttes du peuple marocain dans toutes ses composantes (ouvriers, paysans, étudiants, élèves, chômeurs...).

- avec tous les prisonniers politiques à travers tout le pays et à l'étranger.

Nous condamnons avec fermeté :

- la répression et la mise en isolement que subissent nos familles, l'Union nationale des étudiants du Maroc, les militants du mouvement du 20 Février et tous les militants démocrates.

- les atteintes et les restrictions que subissent les libertés syndicales et politiques au Maroc.

Enfin, nous déclarons notre détermination à continuer la lutte à l'intérieur de la prison par tous les moyens à notre disposition pour réaliser nos revendications justes et correctes et nous faisons porter l’entière responsabilité de ce qui peut nous arriver à la direction pénitentiaire et au régime réactionnaire en place.

"Vous pouvez cueillir toutes les fleurs mais vous ne serez jamais en mesure de stopper l'avance du printemps."

VIVE LA LUTTE DU MOUVEMENT ETUDIANT !

VIVE LA REVOLUTION MAROCAINE !

VIVE LA REVOLUTION PROLETARIENNE MONDIALE !

VIVE LE MARXISME-LENINISME-MAOÏSME !

Signataires :

Groupe Aziz Elkhalfawi :

Aziz ELKHALFAOUI – n° 2375 (Oudaia)

Radwan ELAADIMI – n° 2376 (Ouadhias)

Groupe Aziz Elbour :

Aziz ELBOUR - n°12679 (prison de Tiznit)

Mohammed ELMOUNDEN – n° 21409 (Boulmharez)

Hicham ALMSKINI – n°21 415 (Boulmharez)

Abdelhak ATALHAOUI – n° 21 853 (Boulmharez)

LA VIE DES PRISONNIERS POLITIQUES MAOÏSTES AU MAROC

EN GREVE DE LA FAIM EST EN DANGER !

Le Maroc connaît depuis plusieurs années de vastes mouvements de lutte populaire, au sein notamment de ses universités contre la privatisation de l’enseignement, pour l’amélioration des conditions des étudiants et pour les libertés politiques et syndicales. Dans ce contexte, nombreux sont les étudiants qui ont été arrêtés et condamnés à de lourdes peines lors de procès montés de toutes pièces. Parmi ces étudiants condamnés, se trouvent 7 étudiants maoïstes : Aziz ELBOUR, Mohamed ELMOUNDEN, Hicham ALMSKINI et Abdelhak ATALHAOUI condamnés chacun à 3 ans ferme. Citons aussi les noms d’Aziz ElKHALFAOUI et Rédouane EL AADIMI, tous deux arrêtés le 04.09.2014 et jetés en prison depuis, sans aucune forme de procès – tout comme pour Alaa ADERBALI dernier étudiant arrêté en date et de manière totalement arbitraire.

Depuis le 23.03.2015, ces prisonniers politiques maoïstes du groupe d’Aziz ELBOUR et de celui d’Aziz ELKHALFAOUI, ont entamé et mènent au Maroc une grève de la faim illimitée, d’une part pour dénoncer les exactions et les agressions physiques et morales que ces camarades subissent au quotidien dans les geôles de la réaction et d’autre part pour faire aboutir et imposer leurs revendications justes et légitimes, à savoir principalement l’amélioration de leurs conditions de détention, leurs droits au soin, à être visités et à pouvoir communiquer avec l’extérieur, et enfin leur droit à pouvoir poursuivre leurs études sans entrave.

Ces camarades maoïstes ont été dernièrement rejoints dans leur action par d’autres prisonniers politiques qui ont aussi entamé une grève de la faim illimitée et ce mouvement de résistance s’amplifie jour après jour dans plusieurs prisons du Maroc. Ce mouvement concerne ainsi pour le moment :

  • Abdul Wahab Alramadi et Munir Ashibha de la prison de Fès
  • Zakaria Raakass de la prison de Kénitra
  • Mimoun Aznaï de la prison d’Oujda
  • A ces militants en lutte s’ajoutent aussi le combat des étudiants sahraouis de Marrakech eux aussi en grève de la faim illimitée.
  • Enfin, parallèlement, il est aussi important de rappeler l’engagement de 11 autres prisonniers politiques de la prison de Fès qui ont mené une semaine de grève de la faim et 5 autres détenus de la prison de Meknès qui eux ont jeuné durant 48 heures.

Ces militants ont déjà entamé plusieurs grèves de la faim ; ils ont plusieurs fois été hospitalisés à la suite de leurs actions de résistance et du fait de ce long processus de lutte, leur état de santé est aujourd’hui fragilisé.

Ainsi, le 31.03.2015, le camarade Rédouan EL AADIMI a perdu connaissance et a dû être évacué en urgence à l'hôpital. Finalement, après plusieurs jours, il a été ramené en cellule, mais toujours dans un état critique. Rappelons aussi que le camarade Alaa DERBALI avait lui aussi perdu connaissance le 27.03.2015 et qu'il a déjà été transporté plusieurs fois à l'hôpital dans un état inquiétant. Quant à Aziz ELKHALFAOUI, il a perdu connaissance maintes fois et son état de santé se dégrade rapidement de jour en jour. La situation est aujourd’hui pour eux de plus en plus catastrophique et on peut s’attendre au pire.

Malgré cela, le régime réactionnaire persiste à ignorer les revendications des camarades et cherche par-là à les assassiner à petit feu, comme cela a déjà été le cas pour deux militants morts en détention : Mustapha MEZIANI (décédé le 13.08.2014) et Noureddine ABDELWAHAB (décédé le 01.04.2014).

Nous dénonçons cette politique d’acharnement systématique sur nos camarades et nous déclarons que l’Etat marocain porte l’entière responsabilité de tout ce qui peut advenir les concernant.

Nous appelons aussi toutes les forces démocratiques, progressistes et révolutionnaires à prendre toutes les initiatives nécessaires pour informer de cette situation et à soutenir ou à organiser des actions de solidarité concrète et pratique afin de faire valoir d’une façon active les revendications des détenus politiques maoïstes et de tous les détenus politiques révolutionnaires au Maroc.

SOLIDARITE AVEC NOS CAMARADES EN GREVE DE LA FAIM ILLIMITEE !

VIVE LA LUTTE DU PEUPLE MAROCAIN !

VIVE LA SOLIDARITE INTERNATIONALE DES PEUPLES !

A BAS LA REACTION, L’IMPERIALISME ET TOUS SES LAQUAIS !

Comité d’Action et de Soutien aux Luttes du Peuple Marocain

marocresistance@gmail.com

Collectif Rouge Internationaliste pour la défense des prisonniers politiques révolutionnaires

lecrirouge@gmail.com

Paris, le 02.04.2015

RASSEMBLEMENT POUR SOUTENIR LES PRISONNIERS POLITIQUES MAOISTES AU MAROC

EN GREVE DE LA FAIM

MERCRECI 08 AVRIL 2015 DE 18H A 20H

DEVANT L’INSTITUT DU MONDE ARABE

1 Rue des Fossés Saint-Bernard, 75005 Paris – Métro JUSSIEU

TEMOIGNAGE SUR LA TORTURE

D’UN DES PRISONNIERS POLITIQUES MAOÏSTES DETENUS :

HICHEM ALMSKINI

« Le mouvement étudiant ne peut faire face à la politique de répression et de terreur qu’il subit de la part de la police et des services secrets (…), qu’à la condition que sa lutte embrasse celle des travailleurs, des paysans et des soldats. » Mao Tsé-toung

Après avoir passé une nuit éreintante à écrire un rapport sur la situation que traversait l’université Qadi Ayad et à préparer mes cours pour la fonction que j’exerce – celle d’enseignant prodiguant des cours de soutien –, après donc ces heures de travail et alors même que je me décidai à aller me coucher, j’ai été surpris par un groupe de policiers qui a brutalement fait irruption chez moi.

Après m’avoir fait subir une pluie d’insultes et de coups, ils ont fini par me menotter à un coin de ma chambre, avant de se mettre à la fouiller de fond en comble. De cette fouille, il me reste notamment en mémoire ce moment douloureux où ils ont violemment arraché le drapeau palestinien accroché à un des murs de ma chambre : ce fut comme s’il m’arrachait le cœur ! Puis ils ont également mis en miettes la photo du camarade internationaliste Che Guevara et ont confisqué tous mes livres.

Une fois ceci réglé, ils m’ont sorti de l’appartement et m’ont descendu, toujours sous un déluge d’insultes et de coups. Quand je me suis retrouvé en dehors de l’immeuble, j’ai alors pu évaluer à sa juste dimension le nombre considérable des forces répressives présentes – à l’image de celles que l’on envoie lors d’une intervention sioniste contre les maisons des Gazaouis. C’est à cet instant précis que j’ai pris conscience que notre situation était à l’égal de celle des Palestiniens.

Ils m’ont alors fait monter dans une estafette bleue : j’ai retrouvé à l’intérieur deux de mes camarades - Mohamed ELMOUADEN et Boujemâa JAMOU-. Des traces de torture étaient déjà, à cet instant, visibles sur leurs visages. Puis nous ont rejoints les camarades Aziz ELBOUR et Mohamed HARIK, tous deux épuisés également par les sévices de la torture qu’ils avaient déjà endurés. Sur le visage du camarade ELBOUR apparaissaient nettement des traces de coups et de même pour le camarade HARIK qui présentait des bleus sur ses bras.

A ce moment, des gémissements et des cris se sont fait entendre du rez-de-chaussée de l’immeuble. Et après quelques minutes, on a pu voir sortir de la maison d’autres camarades : ZADDOU, ELBAGDADI, NEJMI, LOUAKASSI. Eux aussi ont été embarqués dans une autre estafette et les deux véhicules ont alors démarré en trombe. Dans ce cortège, les deux estafettes étaient escortées par plusieurs voitures policières et par des motos - comme s’ils avaient arrêté un groupe qui appartiendrait au groupe sioniste « notre maison Israël ».

Lorsque nous sommes arrivés à la préfecture, on nous a fait descendre des estafettes toujours sous un déluge d’insultes accompagné de gifles, de coups de poing et de coups de pieds ; puis nos gardiens nous ont mis face au mur. Ils m’ont arraché ma montre de marque Swatch, mon téléphone portable, et l’un deux m’a dit : « toi, tu ne mérites pas d’être cet endroit ! Fils de pute !».

Après une heure passée sous un soleil de plomb, ils nous ont fait entrer à l’intérieur de la préfecture et ils nous ont répartis dans des bureaux vides de tout, à l’exception de la présence de nos tortionnaires. Ils m’ont mis sur mes genoux, visage face au mur : « Assieds-toi sur tes genoux, pédé, fils de pute !», pour qu’ensuite commence le déroulé de l’interrogatoire sur ce que nous planifions sur le plan politique.

Comme je résistai à leurs brimades, l’un d’eux m’a donné un coup de pied sur la poitrine d’une violence telle que je suffoquai à en perdre tout mon souffle ; et avant même que je puisse récupérer mes forces, un autre flic déjà me donnait un autre coup de pied cette fois sur le bras gauche au point que je ne le sente bientôt plus. Le policier chargé de mon interrogatoire est alors devenu presque fou : il a commencé à vouloir m’arracher les oreilles ; il donnait dessus des coups si violents que je crus que j’allais en perdre l’ouïe. Je me suis dit alors : « ma vie n’a de prix que pour servir mon peuple ! ».

Tout cela a continué à une heure très tardive de la nuit. Puis ils nous ont descendus dans les sous-sols et ils nous ont regroupés, moi et mes camarades tous marqués à vif par la torture qui nous avait éreintés. Malgré tout cela, nous avons chanté pour l’avènement de notre patrie et nous avons répété des mots d’ordre comme celui d’un poète : « Oui nous allons mourir ; mais avant cela nous éradiquerons la torture de notre terre !». Tous ces chants nous ont aidés à défier la torture, la faim et le manque de cigarettes.

Le jour suivant, le 16.02.2013, nos tortionnaires nous ont fait remonter l’un après l’autre pour continuer le même scénario que celui du premier jour, avec cependant une variante : le remplacement de nos bourreaux par de nouveaux. Chacun d’eux était dans une pièce particulière et avait ses propres méthodes de torture : l’un excellait pour décoller les oreilles, l’autre pour donner des gifles, des coups de pieds, ou pour écraser sa victime ; un autre encore se réservait encore pour tirer les cheveux avec à chaque fois, à la fin, la même menace : celle de nous violer.

Durant ce jour, ils concentrèrent leurs questions sur nos objectifs politiques et sur la stratégie visée par notre action. Ces questions - reflets d’intelligences médiocres – étaient par exemple les suivantes : « Que voulez-vous faire dans ce pays ? Qui vous finance ? Qui est votre leader ? Comment vous procurez-vous les livres de ce pédé de Mao ? Quel lien existe-t-il entre vous et Mao alors que lui est Japonais et vous Marocains ? ». Quelle ignorance ! Ils ne savent même pas de quel pays provient le président Mao.

Bien sûr, chaque question et chaque commentaire étaient entrecoupés de périodes de torture. Et dans cette situation, je pensais toujours à mon cher camarade de route, le martyr Abdelrazak ELGADIRI, ce qui me permettait de supporter ce calvaire et d’occulter la torture.

Cette situation a continué jusqu’au soir ; puis ils nous ont redescendus aux sous-sols sans nous permettre de manger ni de fumer.

Le dimanche 17.02.2013, ils nous ont présentés au procureur pour prolonger notre « garde à vue » car 48h ne leur avaient pas suffi pour nous faire plier. Puis ils nous ont ramenés à la préfecture pour entamer le dernier acte déterminant de ce processus de tortures physique et psychique. Il s’agissait de nous faire signer des aveux déjà concoctés dans les bureaux des services secrets. L’un d’eux m’a dit de signer, et lorsque j’ai refusé, il m’a tordu le bras droit jusqu’à pratiquement le briser. Un autre a commencé à signer en mon nom et là encore tout cela après une longue période de torture. Puis ils nous ont jetés de nouveau dans les caves.

Tout cela jusqu’au jeudi où ils nous ont emmenés au tribunal. Les traces de coups de la torture se voyaient encore distinctement sur nos corps. Et les avocats de la défense en ont alors profité pour exiger que soit faite une expertise médicale ; ce que le procureur du roi a ordonné.

On a alors été amené à l’hôpital Ibn TOUFAYL pour voir un médecin mais ce dernier n’a fait qu’inscrire la mention « rien à signaler » sur tous les documents, et nous avons donc compris qu’il était totalement corrompu. Puis a commencé notre détention à la prison de BOULMAHREZ, connue de tous pour sa mauvaise réputation.

Comment conclure tout ceci si ce n’est de rappeler que le projet de l’unification de la résistance ne peut se construire qu’avec des initiatives sérieuses qui s’appuient sur l’engagement et l’autocritique militantes et politiques, et qui seront évidemment initiées par la lutte sur le plan des libertés politiques et syndicales.

GREVE DE LA FAIM AU MAROC : LIBERATION DE DEUX CAMARADES !

Hier, jeudi 16 avril deux d'entre eux ont été libérés : Aziz ELKHALFAOUI et Rédouane EL AADIMI - qui étaient jusque-là détenus à la prison de Marrakech et qui avaient initié le dernier mouvement des grèves de la faim.

Leur détention a duré 7 mois - 7 mois de détention illégale puisqu'ils ont été déclarés innocents par rapport aux charges qui étaient retenues contre eux.

Seule la lutte paie ! Osons lutter ! Osons vaincre !

CE N’EST QU’UN DEBUT ! CONTINUONS LE COMBAT POUR LA LIBERATION DE TOUS LES DETENUS POLITIQUES REVOLUTIONNAIRES AU MAROC !

17 avril 2015

Comité d’Action et de Soutien aux luttes du peuple Marocain

LE COMBAT CONTINUE !

RETOUR SUR LES DERNIERS EVENEMENTS SURVENUS

A LA FACULTE DE CAADI AYAD le 26 mai 2015 :

face à la répression, l’opposition et la résistance du peuple encore et toujours !

VIVE LE MOIS DE MAI ROUGE !

VIVE LE BASTION D’ABELRAZAK ELGADIRI !

RESISTANCE, COMBAT ET VICTOIRE !

La faculté CAADI AYAD de Marrakech a connu ces dernières semaines des révoltes populaires d’étudiants contre les politiques réactionnaires de l’Etat Marocain menées dans le domaine de l’enseignement. Ces dernières sont des attaques répétées dirigées contre les acquis matériels et moraux des étudiants.

Dans ce contexte catastrophique, les masses estudiantines ont décidé de résister et de mener des luttes pour imposer leurs revendications justes et légitimes. En réponse, ils se sont vus réprimés violemment et assiégés une fois de plus - comme à l’habitude des réactions de ce régime barbare.

Suite à cette répression d’une violence sans précédent, les étudiants ont décidé, après maints débats et réflexions, de riposter. Des milliers d’étudiants ont ainsi défilé dans les rues adjacentes de la cité universitaires dans un esprit responsable et déterminé, en scandant des mots d’ordre qui reflètent leurs revendications légitimes – comme par exemple : « Nos bourses sont détournées par les politiciens corrompus ! » et «Avoir une bourse et pouvoir poursuivre des études en 3è cycle, c’est un droit et non pas un privilège! ».

Les manifestants ont emprunté les ruelles des quartiers avoisinants à la cité universitaire pour ensuite se diriger vers la présidence de la faculté et se retrouver sur le boulevard d’Allal ELFASSI. C’est alors que les étudiants ont été encerclés par les forces de répression et qu’ils ont dû subir une pluie de coups de matraque et de gaz lacrymogènes. Cette répression s’est déroulée sous les yeux mêmes des masses populaires qui ont dénoncé ces pratiques barbares opposées à de simples étudiants non armés et pacifistes. A suite à cette attaque des forces de répression, nombreux ont été dénombrés les blessés au sein des étudiants.

Au retour des étudiants à la cité universitaire, les premiers secours aux blessés ont commencé à s’organiser au sein des étudiants eux-mêmes puisque les ambulances et les médecins ne se sont pas déplacés pour apporter les premiers soins aux étudiants.

Or c’est à ce même moment qu’un nombre très important des forces de la répression de toute sorte a pénétré et encerclé la cité universitaire. Cette opération, par sa violence, a rappelé à tous les présents les boucheries qu’avaient été perpétrées par le régime fasciste en 2008 quand avaient été défenestrés 2 étudiants du 4ème étages et violés 2 étudiantes sous les yeux mêmes de leurs camarades (sans mentionner aussi les coups qui s’abattaient sur les têtes des étudiants, la chasse ouverte orchestrée par les chiens policiers contre ces derniers et toute l’armada des actions de répression).

Face à ces attaques d’une rare brutalité et lâcheté de la part de ce régime pourri, les étudiants ont tout de même voulu riposter et ont tenté de chasser de l’enceinte de la cité universitaire les assaillants policiers, en scandant les mots d’ordre suivants : « la fac est un lieu pour étudier et non pas une caserne militaire ! A bas la militarisation et la criminalisation des luttes du bastion de Marrakech ! ».

Les étudiants ont finalement réussi, au bout de trois tentatives, à repousser et chasser définitivement les forces de répression hors de l’enceinte de la cité universitaire. Néanmoins, ces dernières se sont ensuite repositionnées pour fermer tous les accès à la cité universitaire et ont obtenu un renfort sans précédent – celui de tous les différents corps de police et militaires. A ensuite été mené un nouvel assaut qui a conduit à la défenestration de 2 étudiants et au vandalisme des chambres des étudiants mises à sac et où ont été volés tous les biens des étudiants.

Ce qui s’est passé à l’intérieur de la cité universitaire a connu heureusement un vif, large et immédiat écho dans toutes les autres universités de Marrakech. L’ensemble des étudiants ont alors déserté les salles d’étude, les amphis et ont boycotté les examens. Tous ont aussi pris la décision de se diriger vers la cité universitaire saccagée et s’est alors mis en mouvement le vaste cortège d’une manifestation de protestation et de dénonciation de ce qu’était arrivé et pour que soit levé immédiatement l’encerclement imposé à leurs camarades.

Or, cette fois encore, les force de répression se sont abattus sur les étudiants manifestants et les ont réprimés sous les regards des professeurs pour une bonne partie solidaires avec les étudiants.

Aujourd’hui encore, les forces de répression continuent à encercler la cité universitaire de la faculté de CAADI AYAD et on dénombre jusqu’à ce jour plusieurs blessés parmi les étudiants et plus de 40 arrestations.

Nous adressons nos salutations aux étudiants qui ont mené cette bataille héroïque et qui ont donné une leçon sévère à ce régime réactionnaire – une leçon de résistance, de combat et d’abnégation.

Nous levons haut et fort nos poings en signe de victoire, en direction des masses estudiantines de toutes les universités du Maroc et vers tous les militants qui ont exprimé leur solidarité avec les étudiants du bastion de Marrakech.

Vive la lutte des masses estudiantines !

Que vive la mémoire Abdelrazak ELGADIRI qui illumine le sentier de la liberté et de l’émancipation !

Paris, le 27 mai 2015

Comité d’Action et de Soutien aux luttes du peuple Marocain

Marocresistance@gmail.com

Page facebook : comite d’action et de soutien aux luttes du peuple Marocain

http://marocresistancescombats.over-blog.com

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